Par I. Bouhrara |
Quelque 7,3 Mds de DH, dont 1,1 Md de DH comme contribution de la FIAC et 6,2 Mds de DH comme contribution de l’Etat seront mobilisés dans le cadre du Contrat-programme relatif au développement de la filière des céréales et légumineuses entre 2021-2030. Détails d’objectifs ambitieux (Trop?) et des mesures prévues pour les réaliser.
La 15e édition du SIAM qui s’est achevée ce dimanche 7 mai à Meknès a été sanctionnée par la signature d’un contrat-programme relatif au développement de la filière des céréales et légumineuses 2021-2030, entre le gouvernement et la Fédération interprofessionnelles des activités céréales et légumineuses (FIAC), dans le cadre de la déclinaison de Génération Green 2020-2030.
Ce contrat-programme signé le 4 mai et dont la feuille de route sera établie de concert entre les parties signataires, vise à améliorer la productivité des céréales et légumineuses, augmenter leur production, renforcer la qualité et la valorisation, structurer et moderniser les circuits de commercialisation et de distribution des produits de la filière.
L’ambition est d’améliorer le taux d’utilisation des semences certifiées pour atteindre 40% contre 19% en 2020 pour les céréales et 15% contre 2% en 2020 pour les légumineuses. Le contrat-programme vise l’équilibre de l’assolement céréalier/légumineuses sur une superficie de 5 Millions ha.
L’objectif assigné est d’assurer une augmentation de la production des céréales à 95 Millions de QX et des légumineuses à 6,5 Millions QX, avec l’extension de la superficie assurée contre les aléas climatiques pour atteindre 2,2 millions ha contre 1 million ha en 2020.
Cette nouvelle génération de contrat intègre également l’impératif de mise en place d’un stock de sécurité stratégique en céréales et légumineuses et de mise en place des capacités du stockage de proximité.
En aval, ce contrat-programme portera le taux d’incorporation du blé national dans la production des farines pour atteindre 50% et 10% respectivement pour le blé tendre et le blé dur. De même qu’il poursuivra l’ambition d’améliorer le taux d’utilisation de la semoule nationale du blé dur dans la production des pâtes et couscous pour atteindre 10%.
Le coût global de la mise en œuvre des actions prévues dans le cadre de ce Contrat-Programme s’élève, sur la période 2021-2030, à près de 7,3 Mds de DH, dont 1,1 Md de DH comme contribution de la FIAC et 6,2 Mds de DH comme contribution de l’Etat.
Collecte, stockage, transformation, circuit, innovation et R&D
Pour atteindre les ambitieux objectifs de ce contrat-programme, une série de mesure seront entreprises à commencer par le développement de la valorisation qu’une amélioration du stockage.
Afin d’atteindre les objectifs de professionnalisation et modernisation des capacités de stockage des céréales et légumineuses, à même de réduire les pertes post récolte, de préserver la qualité intrinsèque de la production nationale et mieux la valoriser, la FIAC s’engage à contribuer à l’étude d’identification des besoins en capacité de stockage de proximité et leur répartition sur les principaux bassins de production de céréales et légumineuses, tout en encourageant les opérateurs à investir dans les unités de stockage de proximité ;
L’Etat, en plus de réaliser l’étude sur l’identification des besoins en capacité de stockage de proximité et leur répartition par bassin de production, accordera l’appui à l’investissement en équipements de stockage et manutention modernes au profit des collecteurs de proximité, au niveau des principaux bassins céréaliers. Un cahier de charge sur les bonnes pratiques de stockage des céréales et légumineuses et le respect de la réglementation sanitaire sera élaboré dans ce sens.
Mais la mesure phare demeure la révision à la hausse de la subvention accordée au stockage des céréales pour passer de 10% à 25%.
Par ailleurs, et dans le cadre du développement de la première transformation des céréales et des légumineuses, la FIAC s’engage à sensibiliser les industriels à l’amélioration du taux d’intégration des blés nationales dans la production des farines et semoules pour atteindre à l’horizon 2030 des taux de 50% et de 10% respectivement pour le blé tendre et le blé dur.
Dans ce sens, un grand chantier sera enclenché, celui de la mise en conformité des moulins artisanaux.
L’Etat lui, s’engage à réviser la subvention accordée aux unités de valorisation des légumineuses de 20% à 30% du coût de l’investissement. Une étude de diagnostic des moulins artisanaux et leur part dans le marché domestique des farines et semoules sera réalisée et permettra d’élaborer des scénarios de mise à niveau, avec un programme d’accompagnement dédié.
Concernant la deuxième transformation des céréales et des légumineuses, la FIAC sera amenée à renforcer le partenariat interprofessionnel pour développer une production locale du blé dur répondant aux exigences des semouleries industrielles et permettant une production de pâtes alimentaires et couscous à base du blé dur.
Par ailleurs, elle devra promouvoir la consommation de pâtes alimentaires d’origine Maroc et appuyer le secteur de la boulangeries/pâtisserie pour sa mise à niveau et le renforcement de sa compétitivité à travers l’élaboration de référentiels des produits, d’un cahier de charges de mise à niveau et d’un guide de bonnes pratiques et ce, dans le cadre d’une contractualisation avec la profession de la boulangerie. Il s’agit également d’accompagner les unités du secteur informel de boulangerie et pâtisserie pour leur migration vers le secteur formel. Un programme de développement dédié devrait être mis en place par l’Etat.
En ce qui concerne l’épineuse question du stock stratégique de sécurité, le document nous renseigne sur comment les deux parties devront s’y prendre pour répondre à l’impératif objectif de sécurité alimentaire.
Ainsi, la FIAC s’engage à contribuer à la mise en place de stock stratégique des céréales et légumineuses à même de faire face aux situations exceptionnelles menaçant la régularité des approvisionnements en céréales et légumineuses.
L’Etat s’engage pour sa part, à mener, en concertation avec la FIAC, une réflexion autour de la mise en place d’un stock stratégique des céréales et légumineuses et les mécanismes de sa gestion.
Par ailleurs, dans le cadre des mesures visant à améliorer les circuits de collecte, la FIAC s’engage à contribuer, aux côtés de l’Etat à la réalisation d’une étude sur le recensement et la catégorisation des collecteurs de proximité. De même qu’elle se doit de sensibiliser et accompagner les opérateurs à investir dans la collecte de proximité et à adopter de bonnes pratiques de stockage et de collecte.
Sur un autre registre, la fédération doit mettre en place des plateformes de stockage dans les bassins stratégiques pour dynamiser la collecte de la production nationale à travers l’accompagnement des agriculteurs directement ou à travers les collecteurs de proximité. Ainsi que mettre en place une bourse de céréales et légumineuses sous format d’une plateforme digitalisée.
Dans ce sens, une étude de diagnostic et d’évaluation des conditions de transit portuaire des céréales sera effectuée en vue d’identifier les solutions à déployer pour pallier les dysfonctionnements actuels.
Le contrat-programme prévoit la mise en place d’un programme de R&D pour répondre aux besoins en recherche-développement pour la filière céréales et légumineuses.
L’Etat s’engage à travers l’INRA, d’améliorer la productivité et de la valorisation des légumineuses en développant de nouvelles variétés productives répondant aux besoins des agriculteurs et consommateurs et en développant des produits valorisés.
Le développement de nouvelles variétés de céréales pour faire aux changements climatiques et la conception d’une gestion intégrée pour une intensification durable, sont pris en ligne de compte, face aux défis climatiques de plus en plus pesant.
Le contrat-programme prône également la préservation des ressources naturelles, avec l’encouragement de l’irrigation d’appoint dans les périmètres potentiels qui seront identifiés et équipés et avec la promotion de l’énergie solaire. Cela passe également par le programme national du développement du semis direct.
L’Etat s’engage ainsi à l’identification et l’équipement des zones potentielles pour l’irrigation d’appoint sur 1 000 000 Ha, l’encouragement de l’irrigation d’appoint à travers le maintien de la subvention en cours et la mise en œuvre du programme national du développement du semis direct pour atteindre une superficie d’un million Ha à l’horizon 2030.
Dans le cadre d’encouragement de la certification biologique pour une meilleure valorisation des produits des céréales et légumineuses, les Parties travailleront ensemble pour accompagner les opérateurs dans les démarches de la reconversion, de la certification Bio et de l’élaboration des cahiers des charges y afférent pour atteindre à l’horizon 2030 une superficie de 8.305 Ha.
L’Etat maintient les incitations accordées pour la certification à la production biologique et prévoit de mettre en place une nouvelle subvention relative à la reconversion des cultures en mode biologique.
Elément humain et nouvelle génération de classe moyenne agricole
En signant ce contrat-programme, les partis s’engagent en faveur du renforcement de la classe moyenne agricole, des jeunes entrepreneurs agricoles, des organisations agricoles et de nouveaux mécanismes d’accompagnement, c’est ce qui se dégage du préambule du contrat dont EcoActu.ma détient une copie.
Les Parties entreprendront ainsi des actions en faveur de l’émergence d’une classe moyenne agricole engagée dans la production de céréales et légumineuses à travers la souscription des agriculteurs à l’Assurance Multirisque Climatique et à la protection sociale.
Dans ce sens, la FIAC est appelée à assurer la sensibilisation de ses adhérents en vue de souscrire aux produits d’assurance multirisque climatique couvrant la filière des céréales et légumineuses et offerts par les organismes d’assurance désignés par l’Etat.
Elle s’engage également à inciter les opérateurs à adhérer au système de protection sociale avec l’appui et l’accompagnement de l’Etat, dans le cadre de la loi-cadre 09.21 relative à la protection sociale. Ainsi seront communiquées au ministère de l’Agriculture les données et les informations relatives aux opérateurs et aux salariés éligibles à ce système.
A cet effet, la FIAC se porte partenaire dans ce processus jusqu’à son aboutissement et devra mettre en place des outils pour sensibiliser et inciter les agriculteurs, opérateurs et ouvriers de la filière à souscrire à la couverture sociale mise en place par l’Etat, souligne-t-on.
Pour sa part, l’Etat s’engage à réviser et/ou diversifier les produits d’assurance agricole concernant la filière, de même qu’à contribuer aux souscriptions pour encourager l’adhésion aux produits d’assurance mis en place pour atteindre une superficie assurée de 2,2 millions Ha.
Il contribuera également à la mise en œuvre des campagnes de sensibilisation/information sur les assurances intéressant la filière des céréales et légumineuses et mettre à la disposition de l’interprofession les infrastructures du Ministère pour l’organisation des activités de formation, de sensibilisation et d’information.
Par ailleurs, vu les dispositions du contrat-programme, l’Etat est appelé à mettre en place une couverture sociale obligatoire pour tous les opérateurs de la filière dans le cadre de la loi-cadre 09.21 relative à la protection sociale.
Aussi, tout un chapitre est-il consacré à l’encouragement de l’entrepreneuriat des jeunes ruraux et des femmes rurales notamment à travers la mise en place d’un dispositif d’accompagnement pour le montage de leurs projets, le renforcement de leurs capacités entrepreneuriales et l’identification des créneaux porteurs de potentialités de création de PME et TPE, de coopératives entrepreneuriales et de sociétés de prestation de services.
Aussi, l’Etat s’engage à mettre à la disposition des jeunes entrepreneurs une partie du foncier relatif aux terres agricoles collectives identifiées pour la réalisation de leurs projets d’investissements. L’Etat accordera des aides spécifiques à ces jeunes entrepreneurs pour les inciter à concrétiser leurs projets.
Pilotage et suivi
La réalisation des ambitions de ce contrat-programme passe par plusieurs paliers.
D’abord, la mise en place d’une nouvelle génération d’organisations agricole. Dans ce sens, et dans le cadre du renfoncement de l’insertion des opérateurs le long de la chaine de valeur, la FIAC à travers ces différents collèges œuvrera à encourager le développement d’organisations professionnelles de nouvelle génération notamment de l’agrégation, des coopératives et des associations.
Elle est appelé à encourager l’agrégation comme outils d’organisation des producteurs avec un objectif de mise en place de 3 projets au minimum conformément à la loi 04-12 sur l’agrégation agricole et ses textes d’application.
De plus, pour dynamiser, autonomiser et améliorer davantage la gouvernance de la FIAC, celle-ci s’engage à renforcer l’organisation professionnelle de la filière des céréales et légumineuses et l’élargissement de la base des adhérents et un déploiement régional. Elle doit veiller à mettre en place un système qualité et un SI en son sein.
L’Etat s’engage d’ailleurs à accorder aux projets d’agrégation dans la filière des céréales et légumineuses, les aides financières prévues par la loi 04-12 sur l’agrégation agricole et ses textes d’application ;
Pour le renforcement de la gouvernance interprofessionnelle de la filière des céréales et légumineuses, l’Etat apportera son appui technique, financier et institutionnel à l’interprofession afin de poursuivre sa mise en conformité avec la loi 03-12 relative aux interprofessions agricoles et halieutiques et ses textes d’application.
Pour ce qui est du pilotage par l’Etat, la gouvernance du Contrat-Programme est assurée par le comité de pilotage stratégique, présidé par le Ministère de l’Agriculture, de la Pêche Maritime, du Développement Rural et des Eaux et Forêts (il se réunit une fois par an et chaque fois que cela s’avère nécessaire) ; le comité exécutif, présidé par le Secrétaire Général du département de l’Agriculture (Il se réunit une fois par semestre) ; et le comité de suivi de mise en œuvre du contrat-programme, présidé par le Directeur du Développement des Filières de Production (Réunion trimestrielle).
Aussi, le Contrat-Programme fera l’objet d’une évaluation tous les trois ans par un comité ad-hoc désigné à cet effet par le comité de pilotage stratégique.
Le MAPMDREF s’engage à mettre en place un SI permettant le suivi des réalisations des projets/actions prévus dans le cadre du Contrat-Programme. Ce système doit permettre le partage de l’information et des statistiques entre le MAPMDREF et la FIAC. L’Interprofession s’engage à renseigner le SI en information sur l’état d’exécution de tous les projets/actions se rapportant au Contrat-Programme.