Comme nous l’avions annoncé dans un article introductif, l’économiste spécialiste en politique de change Omar Bakkou s’est attelé sur une foultitude de questions en vue de vulgariser l’Instruction Générale des Opérations de Change-24. Le but étant de mettre à la disposition des acteurs toutes catégories confondues un guide didactique susceptible de mieux comprendre ce texte essentiel de la règlementation des changes du Maroc.
EcoActu.ma : Si on vous demande de résumer en deux mots l’Instruction Générale des Opérations de Change, vous dites quoi ?
Omar Bakou : Il s’agit d’un texte essentiel de la règlementation des changes du Maroc.
Et , c’est quoi la règlementation des changes ?
L’expression règlementation des changes a un fondement juridique.
Ce fondement consiste dans le dahir du 30 aout 1949 relatif à la répression des infractions à la réglementation des changes.
Ce dahir a en effet introduit cette expression pour la première fois.
Et comment ce Dahir définit la règlementation des changes ?
Ce dahir définit la règlementation des changes comme étant l’ensemble des dispositions résultant de Dahirs énumérés par ledit dahir, ainsi que les arrêtés ministériels et instructions du Directeur de l’Office des Changes pris pour leur application.
Vous dites que la règlementation des changes a un fondement juridique, cela sous-entend que cette expression n’a pas de fondement économique ?
Non le qualificatif réglementation des changes est également pertinent sur le plan économique, car l’objectif de cette règlementation est de veiller à la mise en place d’un « marché des changes administré ».
Or, qui dit marché des changes dit opérations de change, c’est-à-dire opérations d’achat et de vente de devises.
Vous dites que l’objectif principal de la règlementation des changes est de veiller à la mise en place d’un marché des changes administré. Qu’est-ce que cela signifie au juste ?
Un « marché des changes administré » est un régime dans lequel les paramètres fondamentaux de ce marché (l’offre, la demande et le prix) sont régis par des règles anti-marché.
Des règles anti-marché signifie concrètement l’absence d’une molécule essentielle pour un fonctionnement efficient d’un marché donné, à savoir la liberté.
En effet, dans ce régime l’offre des devises n’est pas libre dans le sens où les personnes qui génèrent des recettes en devises sont obligées de les offrir sur le marché des changes où plutôt de les céder à l’Etat.
De même, dans ce régime la demande de devises n’est pas libre dans le sens où les personnes qui souhaitent acheter des devises sont obligées de se procurer un ticket de rationnement auprès de l’Etat (autorisation de l’Office des Changes).
En outre, dans ce régime le prix des devises n’est pas libre dans la mesure où ce prix est fixé de manière administrative par l’Etat.
Vous parlez ci-dessus de marché et de règles anti-marché, pourriez-vous clarifier davantage ces éléments ?
Oui il y a une différence fondamentale entre un marché et les mécanismes de marché.
En effet, on parle de marché chaque fois qu’il y a une offre et une demande.
Mais, les mécanismes de marché symbolisent essentiellement la liberté : liberté de la demande, liberté de l’offre et liberté des prix.
En effet, ce sont ces trois libertés qui insufflent une dynamique au marché et le rendent vivant, et partant, efficient.
Vous venez de nous expliquer le concept de marché des changes administré. Ce concept a-t- il un lien avec celui de contrôle des changes ? parce qu’on entend souvent dire que le Maroc adopte le contrôle des changes !
Oui effectivement le contrôle des changes signifie que le marché des changes est contrôlé, c’est-à-dire que les mécanismes de marché précités ne fonctionnement pas librement.
Autrement dit, l’offre est contrôlée par l’Etat , la demande est contrôlée par l’Etat et le prix est également contrôlé par l’Etat.
Vous dites que l’objectif principal de la règlementation des changes est de veiller à la mise en place d’un marché des changes administré, comment cela se passe concrètement ?
Concrètement cela est organisé en deux piliers.
Il y a tout d’abord le pilier législatif et réglementaire dans lequel sont posés les principes généraux et les règles de base.
Ces éléments sont consignés dans un ensemble de textes :Dahir, Arrêté résidentiel, Décret, Arrêté, etc.).
Puis il y a le pilier qu’on pourrait qualifier d’opérationnel dans lequel sont posées les dispositions opérationnelles.
Ces dispositions sont consignées dans leur majorité dans les circulaires de l’Office des Changes regroupées aujourd’hui dans leur majorité dans un document qui s’appelle l’Instruction Générale des Opérations de Change.