Alors que le dollar montre des signes de recul sur la scène internationale, Christine Lagarde appelle l’Europe à saisir l’opportunité de renforcer le rôle mondial de l’euro. À condition de mener les réformes nécessaires, la monnaie unique pourrait devenir une véritable alternative au billet vert.
L’ euro pourrait devenir une alternative crédible au dollar, à condition que les pays de la zone euro renforcent ensemble les piliers de leur union économique et sécuritaire. Tel est le message de Christine Lagarde, présidente de la Banque centrale européenne (BCE), lors d’une conférence prononcée lundi à Berlin.
Constatant un recul de l’appétit mondial pour les actifs libellés en dollars — sur fond de politique économique erratique aux États-Unis — Lagarde estime que l’Europe se trouve à un tournant : « Les changements en cours ouvrent la voie à un moment euro mondial ».
Des réformes à mener
Mais à condition que les pays membres de la zone conduisent les réformes nécessaires : « L’euro ne gagnera pas en influence par défaut, il devra la mériter. » Christine Lagarde plaide d’abord pour la création d’un marché des capitaux plus profond et plus liquide.
La finalisation du marché unique est un sujet de longue date en Europe. C’était notamment l’objet du rapport d’Enrico Letta, ancien président du conseil italien, présenté en avril 2024. En mars, la Commission Européenne a d’ailleurs lancé l’union de l’épargne et de l’investissement.
« Les investisseurs, et notamment les investisseurs officiels, recherchent aussi une assurance géopolitique », a-t-elle expliqué depuis la Hertie School. En clair : ils privilégient les régions dotées de solides alliances et d’une puissance militaire à même de les honorer. De ce point de vue, l’Europe qui a pendant des décennies sous-investi dans ses armées a un train de retard.
Pour Lagarde, les gouvernements européens doivent aussi encourager l’usage de l’euro dans les échanges commerciaux internationaux. Cela passerait par la signature de nouveaux accords commerciaux, la modernisation des paiements transfrontaliers, ou encore des mécanismes de liquidité étendus via la BCE.
L’or avant l’euro
Pour l’heure, comme le rappelle Christine Lagarde, le dollar reste dominant avec 58% des réserves internationales — un niveau historiquement bas mais encore largement supérieur aux 20% de l’euro.
Et si les investisseurs commencent à se détourner du dollar, c’est davantage l’or qui en profite que l’euro. L’once d’or a progressé de 27% depuis le début de l’année.
C’est donc un long chemin qui se dessine pour la monnaie unique, compte tenu de la vitesse des réformes sur le Vieux continent. Mais si l’euro prend une place plus importante dans les échanges mondiaux, la demande d’euro serait structurellement plus forte, et donc la devise aurait tendance à s’apprécier. Un mouvement favorable à la maîtrise de l’inflation, qui allégerait d’autant la tâche de la Banque centrale européenne.