Dans le PLF 2020, il est prévu une amnistie fiscale en faveur de personnes en infraction avec les règlements fiscal et de change. Recourir chaque fois, sous le sceau des contraintes budgétaires, à la contribution libératoire lui fait perdre toute sa crédibilité.
Les temps sont durs, très durs même. Dans un contexte de raréfaction de la ressource financière et face aux besoins sans cesse croissants de la population, les pouvoirs publics ont prévu entre autres dispositions fiscales dans le PLF 2020 des mesures afférentes à la contribution libératoire que ce soit en matière de versement du liquide dans les dépôts bancaires ou de régularisation des avoirs détenus à l’extérieur.
Cette dernière s’adresse aux personnes domiciliées au Maroc, en infraction avec les règlements fiscal et de change, au titre d’avoirs immobiliers ou financiers détenus illégalement à l’étranger.
A rappeler que la première amnistie a été pilotée en 2014 par Jawad Hamri, ex-DG de l’Office des Changes. Que dire de plus que ce dernier a mené d’une main de maître cette opération financière qui a rapporté à l’Etat la bagatelle de 27,85 Mds de DH. C’était le jackpot.
Aujourd’hui encore l’enjeu est le même. Outre l’amélioration des recettes fiscales, le but ultime de cette opération est la physionomie des finances extérieures du Maroc, notamment la position extérieure globale (PEG) qui va être revalorisée du montant de la contribution libératoire. Le dernier rapport publié par l’institution dirigée par Hassan Boulaknadel relatif à la balance des paiements et la position extérieure globale fait ressortir que le Maroc dégage une situation nette débitrice de 735,9 Mds de DH en 2018 contre 703,4 Mds de DH à fin 2017. Une situation qui inquiète à plus d’un titre.
Là où le bât blesse !
Il faut rappeler que ce coup de poker, les résultats ayant largement dépassé les prévisions (5 Mds de DH), était tout de même conditionné. En effet, en 2014, les pouvoirs publics avaient averti les contribuables en infraction qu’au-delà de la période de souscription, ils seront taxés lourdement s’ils ne déclarent pas leurs dus.
Aujourd’hui, l’Etat en accordant une seconde chance à des personnes ne déclarant pas leurs avoirs détenus à l’étranger, laisse entrevoir son incapacité, en raison du manque en moyens humains et matériels, à identifier et à contrôler ces personnes. Pis, l’Etat laisse comprendre qu’il ne dispose pas d’un outil de recouvrement efficace, (l’exemple de FATCA mise en place par les USA) et souhaite donc donner une deuxième chance aux coupables faute de pouvoir les y contraindre.
Dire que cette opération menée aujourd’hui aura le même succès que sa précédente est fortuit parce que les contribuables ne sont pas dupes et sauront très bien que l’Etat ne dispose pas de moyens de contrôle efficace et, du coup, pourraient ne pas y souscrire.
La réussite de la contribution libératoire en 2014 a démontré le niveau de confiance des opérateurs et citoyens marocains en leur économie et en leur pays. Le passage d’une politique basée sur la sanction vers une politique basée sur la confiance ne peut être qu’applaudie.
Mais recourir chaque fois, sous le sceau des contraintes budgétaires, à la contribution libératoire lui fait perdre toute sa crédibilité en tant que chance à saisir.
Lire également : LE DISCOURS ROYAL RÉVÈLE-T-IL UN NOUVEAU MODÈLE À LA “SCHUMPETERIENNE” ?