Ecrit par la Rédaction I
La préparation du projet de budget 2024 et la programmation budgétaire pluriannuelle 2024-2026 des établissements et entreprises publics (EEP) marquent un tournant dans la mise en œuvre effective du chantier de réforme du secteur public. Pas seulement en intégrant les différentes modifications réglementaires menées dans le cadre de cette réforme pour une meilleure efficience, gouvernance et reddition des comptes, mais également en renforçant le rôle des EEP dans l’accélération des différentes politiques publiques, en s’inscrivant dans une trajectoire de rationalisation et de récupération des marges budgétaires, et en intégrant les défis de souveraineté dans les domaines vitaux et ceux ayant trait au changement climatique…
Pour donner suite à la publication de la note de cadrage pour le PLF 2024, les EEP sont en phase de préparation des projets de budget 2024 et de propositions de programmation pluriannuelle 2024-2026. Un exercice qui marque un tournant décisif dans la mise en œuvre d’un chantier majeur, celui de la réforme du secteur public. Une réforme qui a été couronnée par la loi-cadre 50.21, l’activation de l’Agence Nationale de Gestion Stratégique des Participations de l’Etat et de suivi des performances des établissements et entreprises publics.
La préparation du budget 2024 devra également intégrer tous les changements réglementaires notamment le nouveau décret sur les marchés publics, la circulaire relative au dépôt électronique des factures fournisseurs, la loi sur les délais de paiement…
A cela s’ajoute tous les challenges en matière d’efficience, de soutien aux politiques publiques et sectorielles, à une meilleure gouvernance, une rationalisation des dépenses, une optimisation des investissements…etc.
Justement une circulaire du ministère des Finances vient fixer les trois principales orientations stratégiques qui présideront à l’élaboration du projet de budget 2024 des EEP, à la lumière des grandes orientations du PLF 2024.
Poursuite de la mise en œuvre de la réforme des EEP et des réformes structurelles et sectorielles
Certes la mise en œuvre de ce chantier de réforme du secteur public a enregistré des avancées significatives au cours de l’année 2022, notamment en ce qui concerne la mise en œuvre des textes législatifs et réglementaires stipulés dans la loi-cadre n°50.21 relative à la réforme des établissements et entreprises publiques, mais l’une des premières orientations pour le projet de budget 2024 est la poursuite des réformes structurelles.
L’un des principaux objectifs de la réforme du secteur public est la rationalisation du portefeuille public dans le but de permettre à l’État de se concentrer sur les secteurs stratégiques capables de développer l’économie nationale, ce qui passe par l’efficience, la performance, la mutualisation, la complémentarité et la rationalisation des finances publiques.
A cet effet, les processus de restructuration concernera l’élimination des activités ayant un impact limité sur le développement économique et social, la fusion ou le regroupement d’organismes afin de créer de pôles centres publics, en plus de la conversion des institutions publiques exerçant une activité commerciale en sociétés par actions, le renforcement de la compétitivité, la stimulation, la performance et l’innovation, et la réduction du recours au budget général de l’État.
À cet égard, il convient de rappeler que le ministère de l’Économie et des Finances a réalisé, au cours des dernières années, plusieurs études et consultations afin de lancer des processus de restructuration des EEP, notamment dans les secteurs stratégiques.
Ces efforts ont abouti au ciblage des organismes qui interviennent dans des secteurs prioritaires vitaux tels que l’énergie, les mines, les transports routiers, ferroviaires et aériens, la logistique, le secteur portuaire et l’audiovisuel.
Des ateliers de réforme de ce secteur sont en cours dans le but d’évaluer les modèles des EEP et d’augmenter leurs capacités à contribuer efficacement à la réalisation des grands chantiers, notamment ceux liés au développement des infrastructures, à l’universalisation de la protection sociale, à la réforme du système de santé, la généralisation de l’enseignement primaire et assurer sa qualité, réhabiliter l’offre de formation professionnelle, relancer le produit touristique national et renforcer l’attractivité de la politique volontariste du Maroc dans le domaine de l’économie de l’eau, des projets d’énergies renouvelables, de l’efficacité énergétique et de l’investissement vert, outre l’accompagnement des efforts visant à développer les investissements dans le secteur privé.
Dans ce contexte, l’activation de l’Agence nationale pour la gestion stratégique des contributions de l’État et le suivi de l’efficacité des performances des EEP accéléreraient le processus de restructuration des EEP qui relèvent de son périmètre en consultation avec les parties concernées.
Les établissements et entreprises publics qui ne rentrent pas dans le champ d’intervention de l’Agence nationale de gestion stratégique des contributions de l’État et de suivi de l’efficacité de la performance des EEP sont tenus de fournir au ministère de l’Économie et Finance, dans les plus brefs délais, les propositions de restructuration et de réforme de leurs modèles financiers et économiques en ligne avec les grandes orientations du nouveau modèle de développement.
Les établissements et entreprises publiques entrant dans le champ d’intervention de l’Agence sont tenus de fournir à cette agence les propositions susmentionnées.
Les EEP comme vecteur d’accélération de la mise en œuvre des chantiers structurels pour renforcer la souveraineté nationale dans les secteurs vitaux
Le chantier royal relatif à la généralisation de la protection sociale constitue l’un des éléments de base pour la construction de l’État social. Par conséquent les EEP directement impliqués dans ce secteur sont tenus d’accélérer la mise en œuvre avec rigueur et fluidité la mise en œuvre de ce chantier royal, notamment dans le contexte des fluctuations économiques et des risques sanitaires dont le monde a pris conscience.
Il en découle également une réforme radicale du système national de santé auquel les EEP sont appelées à contribuer notamment en ce qui relève du renforcement de la gouvernance hospitalière, la valorisation des ressources humaines, la réhabilitation de l’offre de santé, ainsi que la digitalisation du système de santé national.
En application des Instructions Royales contenues dans le Discours Royal adressé au Parlement du 14 octobre 2022 et de celles contenues dans le Discours Royal du 29 juillet 2023, les EEP sont également appelés à prendre en main la problématique de l’eau, non seulement en révisant leurs systèmes d’exploitation et leurs propres modèles économiques et financiers, mais en mettant en œuvre des projets qui ont été identifiés dans le cadre des programmes liés au secteur de l’eau, qui concernent notamment le rationalisation de l’exploitation de l’eau, la préservation des ressources en eau et investissement dans les innovations et technologies modernes. Idem pour le secteur de l’énergie.
Pour atteindre ces objectifs et améliorer l’efficacité de l’investissement public, les projets d’investissement des institutions et des entreprises publiques doivent tenir compte des directives de base.
Il s’agit ainsi de prendre en considération dans l’élaboration du projet de budget 2024 et celui de programmation pluriannuelle les mesures nécessaires pour encourager et renforcer l’initiative privée et accroître la part des investissements privés à travers des partenariats. Les EEP doivent exploiter les possibilités offertes par le cadre juridique de partenariat entre les secteurs public et privé afin de développer des mécanismes de financement alternatifs et innovants garantissant la réduction de la charge sur le budget général de l’État.
Ils sont appelés par la circulaire de la ministre des Finances à activer les partenariats qui apporteront des financements internes et externes, ce qui permettra bénéficier des compétences et de l’expertise du secteur privé et des expériences internationales pour fournir des solutions et des technologies innovantes, stimuler la compétitivité, réduire les coûts des projets et améliorer leur qualité… Tout cela en adoptant les principes de transparence, d’intégrité et de bonne gouvernance dans les applications publiques, en tenant compte notamment des dimensions économiques, sociales, environnementales et écologiques, ainsi que des objectifs de développement durable, d’efficacité énergétique et de préservation des ressources en eau.
Dans ce contexte, les établissements publics et les entreprises qui disposent de systèmes spéciaux pour les marchés publics sont appelés à mettre à jour leurs systèmes afin de prendre en compte les évolutions induites par le nouveau décret sur les marchés publics.
Pour ce faire, les établissements et entreprises publiques sont invités à formuler leur projet de budget pour l’année 2024 dans le cadre d’une programmation pluriannuelle couvrant au moins la période 2024-2026, conformément aux directives fondamentales en matière de planification, programmation et exécution ; mais aussi en matière de financement.
Pour le premier volet, il s’agira d’accélérer le rythme des projets en cours d’achèvement, notamment ceux faisant l’objet d’instructions royales ou s’inscrivant dans le cadre d’accords nationaux et internationaux signés devant Sa Majesté le Roi, ou ceux qui ont été conclus avec des institutions internationales ou des pays donateurs, et ceux-ci doivent être fournis.
Les projets d’investissement proposés doivent impérativement être accompagnés par des études prouvant leur impact économique et social et précisant les mécanismes de suivi et d’évaluation de leur mise en œuvre et de contrôle de leurs coûts, en tenant compte des approches de genre et d’inclusion sociale, des dimensions de la durabilité environnementale, de l’économie verte, de l’efficacité énergétique et de l’économie de l’eau.
Aussi, les EEP doivent-ils s’abstenir de programmer tout nouveau projet dont la situation réglementaire du foncier n’a pas été apurée au regard des exigences législatives et réglementaires.
Sur un autre registre, les EEP sont sommés de veiller à faciliter l’accès aux marchés publics pour les très petites, petites et moyennes entreprises, les coopératives, les syndicats de coopératives et les auto-entrepreneurs, en tenant compte des délais légaux d’exécution et en soutenant les efforts menés pour améliorer la qualité du climat des affaires et soutenir le produit local.
Au niveau du financement, les EEP sont appelés à donner la priorité aux moyens de bénéficier des financements mis à disposition par le Fonds Mohammed VI d’investissement dans les domaines de la restructuration industrielle, de l’innovation et des activités à forte croissance porteuses, ainsi que de la promotion des petites et moyennes entreprises, des infrastructures, de l’agriculture et du tourisme. Sans oublier le recours aux solutions de financement alternatives et au mécanisme de PPP, en complément des mécanismes de financement vert, qui constituent une alternative stimulante compte tenu des avantages qu’ils procurent. Les EEP doivent également assurer une gestion prudente de la dette pour assurer le contrôle et la maîtrise de son niveau à court terme et à moyen terme.
Serrer la ceinture pour une meilleure durabilité
Comme chaque année et plus encore maintenant que le gouvernement veut restaurer les marges budgétaires, cette année encore, les EEP sont sommés de contrôler les dépenses, réduire les coûts de production, diversifier les sources de financement et développer les ressources afin d’améliorer la durabilité de leurs modèles financiers et économiques.
Cela passe par deux élément clés contenus dans le circulaire de la ministre des finances.
D’abord, le contrôle des coûts de gestion et d’équipement, et la réduction autant que possible, du recours au budget de l’État et le contrôle de la dette.
Exit également l’accumulation des arriérés notamment ceux liés à l’eau et à l’électricité, dus aux organismes impliqués dans ce secteur.
Les EEP doivent également réduire les dépenses liées à l’acquisition de voitures ainsi que les dépenses liées au parc ainsi que les dépenses de construction, des événements…
Ils sont appelés à rationaliser les procédures de passation des marchés publics et les dépenses liées aux études, en recourant aux ressources humaines et des compétences qu’ils possèdent l’institution.
A contrario, les EEP sont appelés à développer les ressources et en améliorer la collecte tout en développant une politique de gestion et de suivi des risques de recouvrement ; Dans ce contexte, les établissements publics et les entreprises concernés sont tenus d’assurer des contributions régulières (3 par an) au budget général de l’État.
Par ailleurs, les EEP doivent mettre en œuvre la Circulaire n° 13/2022 du 12 juillet 2022 relative aux modalités de présentation du compte annuel d’utilisation des fonds et aux aides publiques perçues par les associations.
Les EEP exerçant des activités commerciales doivent respecter et de mettre en œuvre de manière optimale les dispositions transitoires en matière de délais de paiement émises le 15 juin dernier pour éviter les amendes et les sanctions financières en cas de non-respect des exigences de cette loi.
Dans ce contexte, la circulaire du ministère de l’Économie et des Finances n° D1265 du 25 juillet 2023 dispose l’accélération de la prise des mesures réglementaires et de gestion nécessaires pour permettre aux EEP de suivre régulièrement et de manière exhaustive les factures des fournisseurs et de les exécuter dans les délais légaux. Sur un autre plan, les établissements et entreprises publiques sont tenus d’accélérer l’activation des exigences de la circulaire du ministère de l’Économie et des Finances n°C59/20/DEPP du 01/06/2020 relative au dépôt électronique des factures fournisseurs.
Enfin, afin d’accélérer l’élaboration, la présentation et l’étude des projets de budgets des établissements et entreprises publiques et de les approuver dans les délais qui leur sont impartis, il convient de respecter les mesures prévues dans la présente circulaire et les projets de budgets pour l’année 2024, ainsi que ainsi que les documents s’y rapportant, mentionnés à l’annexe 2 de la présente circulaire doivent être soumis à l’organe délibérant de l’organisme concerné avant le 15 novembre 2023 pour approbation.
Les EEP entrant dans le périmètre de l’Agence nationale de gestion stratégique des contributions de l’État et de suivi de l’efficacité de la performance des établissements et entreprises publiques doivent adresser leurs projets de budgets à cette agence avant le 15 novembre. Les autres, doivent adresser leurs projets de budgets au ministère de l’Economie et des Finances pour approbation avant fin novembre 2023 au plus tard.
A noter que les EEP peuvent télécharger leurs projets de budgets et les documents qui y sont joints sur le portail électronique « Massar ».
Lesquels projets doivent être accompagner d’une note détaillée sur l’évolution des indicateurs techniques et financiers les plus importants au cours de l’année en cours par rapport à l’année dernière, et les réalisations des neuf premiers mois de l’année 2023, ainsi que les attentes pour la conclusion de l’année 2023.
De même qu’un tableau détaillant les mesures prises pour rationaliser les dépenses budgétaires réalisées au cours de l’année 2023 et les mesures proposées pour l’année 2024, tout en clarifiant les mesures liées à la lutte contre la crise des prix élevés et la rareté des matières premières.