Ecrit par L. Boumahrou I
5 mois après l’entrée en vigueur du nouveau décret des marchés publics 2.22.431, la relance de la commande publique dans le secteur du BTP n’est pas au rythme attendu. En cause : l’orientation des budgets vers les projets de l’eau devenus une priorité pour le Maroc. La CAN 2025 et la Coupe du monde 2030 vont-elles accélérer la dynamique de la commande publique dans le secteur des BTP ?
Le 1er septembre 2023, la tant attendue réforme de la commande publique aboutissait avec l’entrée en vigueur du nouveau décret des marchés publics 2.22.431.
L’objectif espéré étant l’amélioration du climat des affaires au Maroc, le renforcement de l’attractivité de l’investissement national et étranger, l’encouragement du tissu entrepreneurial, la génération de la croissance pour l’économie nationale et, par ricochet, la création d’emplois. 5 mois après son adoption, l’impact de cette réforme s’est-il fait ressentir sur le terrain ?
Nous avons posé la question au président de la Fédération nationale du bâtiment et des travaux publics (FNBTP), l’un des principaux secteurs concernés par la commande publique.
Selon Mohamed Mahboub, bien qu’il soit encore tôt pour dresser un premier bilan de l’entrée en vigueur dudit décret, les entreprises du BTP ont ressenti une amélioration de la commande publique notamment en ce qui concerne les prix. « Certes, certaines estimations sont encore faibles, toutefois, il ressort des retours des entreprises que les soumissions sont faites au prix des estimations si ce n’est pas plus », nous a-t-il précisé.
En d’autres termes, l’une des avancées de ce décret à savoir l’évaluation des offres financières en tenant en compte de la règle du « mieux-disant » au lieu du « moins-disant » est bel et bien appliquée. Une avancée qui, rappelons-le, va permettre l’écartement d’office des offres anormalement basses en vue de limiter le fléau de la casse des prix et ses répercussions désastreuses sur la commande publique et sur la pérennité de plusieurs entreprises du BTP.
Toutefois, malgré ces avancées, les opérateurs du BTP n’ont toujours pas ressenti la relance de la commande publique. « La relance de la commande publique n’est pas au rythme espéré surtout pour les PME », nous a affirmé M. Mahboub.
Et pourtant, le nouveau décret avait instauré de nouveaux mécanismes pour faciliter l’accès des TPME, notamment les entreprises innovantes, les auto-entrepreneurs, les coopératives aux marchés publics, à travers notamment la réservation de 30% du montant des marchés aux TPE et PME.
La raison principale de ce constat selon Mohamed Mahboub, la conjoncture actuelle du pays qui fait face, pour la 5ème année consécutive, à une sécheresse qui pénalise le secteur agricole ainsi que l’économie marocaine toujours dépendante de l’agriculture.
« Aujourd’hui, en raison de cette conjoncture, la priorité est donnée à l’eau et donc une bonne partie des budgets de la commande publique sera orientée vers les projets de l’eau notamment l’autoroute de l’eau, les barrages, les projets de dessalement d’eau de mer…», a-t-il précisé.
En effet, en raison du de la persistance de la sécheresse, l’effort de l’investissement sera axé dans les projets précités. Des projets importants pour palier la pénurie d’eau mais qui restent très budgétivores.
Mais les opérateurs restent confiants notamment en raison des défis que le Maroc est appelé à relever pour l’organisation de la CAN 2025 mais aussi de la Coupe du Monde 2030.
La Fédération regrette toutefois le maintien de l’exclusion de certains établissements publics de l’application de la réglementation régissant la commande publique notamment l’Agence Marchika, l’Agence Bouregreg, l’ANP, l’ONCF, l’ONDA et l’ONEE…
La FNBTP avait saisi le Chef du Gouvernement afin de solliciter son appui pour que les établissements exclus du nouveau décret adoptent pour la passation de leurs marchés un référentiel unique qui s’aligne avec les dispositions du décret notamment en matière d’application de la généralisation de la préférence nationale à un taux fixe de 15% ainsi que l’application de la règle du mieux-disant, des nouvelles modalités de l’évaluation des offres ainsi que l’intégration de la révision des prix dans leurs marchés. A ce jour rien n’a changé.
La FNBTP persiste que cette exclusion risque de limiter les retombées de ce nouveau décret sur la commande publique.