Le représentant du FMI reconnait que la dette a considérablement augmenté après la crise liée au Covid mais son poids n’est pas aussi inquiétant. En revanche, le Maroc a intérêt à réduire sa dette et à rétablir ses marges de manœuvre afin de pouvoir remplir ses engagements socio-économiques et faire face aux éventuels chocs exogènes.
Dans le cadre des consultations annuelles 2024 au titre de l’article IV, la délégation du Fonds Monétaire International, conduite par M. Roberto Cardarelli, Chef de mission pour le Maroc, a organisé ce mercredi 21 février une conférence de presse à distance. Le but de la rencontre est bien entendu d’évaluer les développements économiques et financiers et discuter des politiques et perspectives économiques et financières du pays avec le gouvernement et les responsables de la Banque Centrale. D’ailleurs tout en saluant les réformes engagées par le Maroc, R. Cardarelli appelle à mettre l’emploi au coeur de toutes les politiques publiques.
« La croissance économique s’est renforcée en 2023 grâce à la reprise de la demande intérieure et au dynamisme des exportations. Elle devrait augmenter progressivement pour atteindre environ 3,5 % à moyen terme, stimulée par une hausse des investissements. Le rebond de la demande intérieure devrait progressivement augmenter le déficit du compte courant de la balance des paiements, qui devrait s’approcher de 3 % du PIB, tandis que l’inflation devrait continuer de baisser au fur et à mesure que les pressions sur les prix des produits de base et des denrées alimentaires s’estomperont », annonce-t-il.
Et d’enchaîner : » L’orientation actuelle de la politique monétaire est appropriée, compte tenu de la baisse de l’inflation, et tout changement ultérieur de cette orientation devrait s’appuyer sur les données. Alors que l’inflation continue de baisser, Bank Al-Maghrib devrait reprendre sa transition vers un régime de ciblage d’inflation ».
La réforme de la TVA devrait améliorer la neutralité de l’impôt, encourager la transition vers l’économie formelle et élargir l’assiette de l’impôt. Même si la réduction progressive du déficit budgétaire au cours des trois prochaines années semble convenable, il est possible d’assurer, voire d’accélérer, le rééquilibrage des finances publiques à moyen terme. Pour cela, il sera nécessaire de poursuivre la réforme fiscale, notamment l’achèvement de la réforme de la TVA et le renforcement du rôle de l’administration fiscale, de rationaliser les dépenses, notamment les transferts vers les entreprises publiques, et d’étendre l’utilisation du Registre Social Unifié à tous les programmes sociaux.
« Pour que la participation du secteur privé aux projets d’investissement dans les infrastructures engagés par les autorités (en particulier dans les secteurs de l’eau et de l’énergie) augmente autant que prévu, il est primordial d’évaluer, de contrôler et de rendre compte de l’incidence éventuelle des futurs projets de partenariat public–privé sur le budget de l’Etat. D’autres améliorations du cadre budgétaire sont prévues, comme l’ajout d’informations supplémentaires sur les recettes attendues de la gestion active du patrimoine privé de l’État et la quantification de l’impact des nouvelles mesures sur les années futures.
« Pour stimuler la création d’emplois et rendre la croissance plus inclusive, il faut accélérer la mise en œuvre des réformes structurelles. La réforme des entreprises publiques, la mise en place du Fonds Mohammed VI et l’application de la nouvelle Charte de l’investissement devraient contribuer à stimuler l’investissement privé, tout comme les nouvelles initiatives visant à renforcer la lutte contre la corruption et les pratiques anticoncurrentielles.
La réforme du régime d’assurance chômage et l’amélioration des politiques actives du marché du travail pourraient favoriser la création d’emplois à court terme. Des efforts supplémentaires sont nécessaires pour améliorer la participation des femmes au marché du travail, qui se situe à un niveau historiquement bas. Les réformes ambitieuses du secteur de la santé et du système éducatif promettent d’améliorer l’accès à ces services et leur qualité, mais aussi de renforcer l’accumulation de capital à long terme.
Les progrès récemment observés dans la libéralisation du marché de l’électricité, ainsi que ceux à venir, devraient encourager la transition vers les énergies renouvelables. Le plan des autorités pour développer les infrastructures est essentiel pour atténuer les problèmes de pénurie d’eau, tout comme l’ajustement des coûts de l’eau et le redoublement des efforts pour parvenir à une utilisation plus efficiente des ressources hydriques.
Interpellé sur la reconduction de la ligne de crédit modulable (LCM), Roberto Cardarelli a répondu que sa reconduction revient tout d’abord aux autorités marocaines. Mais encore faut-il que le Conseil d’administration du FMI approuve la reconduction et son décaissement dépendra de la capacité du Maroc à répondre aux critères d’éligibilité. Mais il est encore tôt de se prononcer sur la reconduction de cette ligne sachant qu’elle n’est pas à terme puisqu’il s’agit d’un accord portant sur deux ans.
Pour rappel, le FMI a introduit, en mars 2009, une facilité destinée aux pays dont les paramètres économiques fondamentaux sont très solides et qui ont fait leurs preuves en matière de mise en œuvre de politiques économiques saines et bien conçues, contrairement aux accords de confirmation de cette institution tributaires de programme contraignants.
Cette facilité constitue une assurance et permet, à l’instar de la Ligne de précaution et de Liquidité (LPL), aux pays membres bénéficiaires de faire face, en cas de besoin, aux chocs exogènes et, par là même, les aider à préserver leur stabilité macroéconomique.
Interrogé par ailleurs sur la soutenabilité de la dette du Maroc, le représentant du FMI reconnait que l’endettement a augmenté considérablement après la crise liée au Covid mais il n’est pas aussi inquiétant. En revanche, le Maroc a intérêt à réduire sa dette et rétablir ses marges de manœuvre afin de pouvoir remplir ses engagements socio-économiques et faire face aux chocs exogènes.