Ecrit par Imane Bouhrara I
« Mon Dieu, gardez-moi de mes amis ! Quant à mes ennemis, je m’en charge ! »
Quand les syndicats se retirent de la séance de vote du projet de loi organique sur le droit de grève pour signer leur contestation et leur rejet de cette mouture, on s’attend que lors du vote dudit projet en deuxième lecture à la Chambre des représentants, les députés de la majorité soient présents en masse pour manifester leur soutien à un ministre de la Coalition gouvernementale ou du moins au chef de la majorité. D’autant que ce jour-là et le suivant, les syndicats avaient appelé à une grève générale et nationale, l’occasion pour la majorité de faire montre de cohésion, de front commun… non, encore une fois, comme pour la grève des enseignants, des étudiants en médecine ou des avocats, le chef de la majorité et le ministre concerné se retrouvent seuls face à la vindicte populaire, bien que la politique n’ait jamais été une sinécure et que le chef du gouvernement est tributaire de son casting.
Et même au-delà, il s’agit de l’aboutissement d’un processus qui était toujours renvoyé sine die sachant l’importance d’une telle loi dans un État de droit et un pays qui lorgne de gros investisseurs qui eux, sont très frivoles lorsque le droit de grève n’est pas cadré par un texte clair. Et on ne vote pas une loi organique sur la grève tous les jours.
Il n’en est rien, le projet de la loi sur la grève est approuvé par la 1e chambre en 2electure avec 84 voix pour et 20 contre. D’autant que cette loi va passer par la case de la Cour constitutionnelle.
Même en 1e lecture, le projet de loi a été approuvé par la 1e Chambre, avec 124 voix pour et 41 contre. L’autre moitié des députés de l’hémicycle qu’avait-elle de mieux à faire sinon de la politique qui plus est, elle est payée pour ?
Les députés ont encore une fois loupé la symbolique d’affirmer un choix, une orientation, un projet de société clair en construction ou simplement pour faire de la politique et défendre un programme politique commun. C’est une posture qui jette le discrédit sur l’élite politique déjà en érosion dans une société où la confiance vis-à-vis du politique est sévèrement effritée.
La scène politique marocaine, et là qu’il s’agisse de ministres, députés ou partis, est empreinte d’une telle platitude en l’absence de débats politiques sur la chose publique, condition sine qua non de la vitalité démocratique avec des positions clairement affichées, argumentées et défendues bec et ongles.
Ça tombe mal, l’échéancier électoral approchant au galop et les électeurs en mal d’élites ayant besoin d’identifier des idées, des personnes pour se projeter dans l’avenir dans le cadre d’un projet de prospérité, de développement et d’avenir.