A l’occasion de la Journée mondiale des Douanes, fixée au 26 janvier sous le thème stimulant de la “mobilisation de partenariats historiques et nouveaux autour d’objectifs clairs”, Larbi Belbachir, ancien haut fonctionnaire à l’Administration des douanes et des impôts indirects (ADII) et expert en lutte contre la fraude et le trafic illicite des stupéfiants, partage dans une interview accordée à la MAP, ses perspectives éclairantes sur les voies et moyens que les douanes marocaines peuvent emprunter pour concrétiser cette approche innovante.
La Journée mondiale des Douanes sera célébrée cette année sous le thème “mobilisation de partenariats historiques et nouveaux autour d’objectifs clairs”. D’après vous, quels sont les voies et moyens pour les douanes de concrétiser cette approche?
En premier lieu, il est crucial d’interconnecter davantage les systèmes. Les moyens pour le faire sont multiples telles que les plateformes collaboratives et de partage qui automatisent et sécurisent l’échange instantané d’informations entre les différentes parties prenantes de l’écosystème douanier.
La montée en puissance dans l’analyse de données est tout aussi fondamentale pour traiter des volumes de data considérables. Et c’est là où l’intelligence artificielle peut apporter une grande valeur ajoutée pour analyser les données, détecter les fraudes et améliorer la prise de décision.
Assurer la transparence des échanges commerciaux est également capital. Là aussi, la technologie offre de nouvelles possibilités avec l’utilisation de la Blockchain qui permet de tracer les transactions commerciales et de renforcer la confiance entre acteurs transnationaux.
Mais le plus important, c’est de conforter les relations humaines et d’organiser des rencontres entre celles et ceux qui forment l’écosystème douanier à travers des formations communes et des exercices de simulation de mise en œuvre de nouvelles règles douanières. Ils auront ainsi une compréhension mutuelle des procédures et des défis auxquels ils se confrontent à différents niveaux. De cela découlera une plus grande efficacité opérationnelle mais aussi de nouvelles synergies et complémentarités avec, à la clé, des bénéfices pour chacun des acteurs de la chaine de valeur douanière.
D’après vous, quels sont les critères qui permettent de définir des objectifs réalisables dans le cadre de cette approche ?
La clarté, évidemment. Mais pas seulement. Deux critères font la qualité d’un objectif : sa conception et sa pertinence.
La pertinence commande l’alignement de chaque objectif avec les priorités stratégiques que l’on poursuit, l’adéquation de son ambition aux ressources disponibles et son adaptabilité aux changements qui interviennent. Un objectif pertinent doit être clair dans sa conception, spécifique, réalisable, mesurable et significatif en termes d’impact sur la trajectoire de la mission que l’on conduit.
Pour la mission de service public dévolue aux douanes partout dans le monde, leurs priorités dépendent de leur contexte et des défis auxquels elles se confrontent dans leurs pays respectifs. Cela dit, elles partagent une matrice commune d’objectifs. Il s’agit notamment de la facilitation du commerce en général et électronique en particulier, de la lutte contre la fraude sans oublier la sécurisation de la chaine logistique internationale.
Au regard de votre expérience, pourriez-vous citer quelques exemples où les douanes ont véritablement eu un effet fédérateur autour de projets structurants?
Par la nature transversale de leurs missions, les douanes fédèrent une grande diversité d’acteurs autour de programmes systémiques qui facilitent notamment le commerce électronique et sécurisent les frontières (administrations sécuritaires et sectorielles, importateurs, exportateurs, transitaires, transporteurs, logisticiens,.. etc.).
De par leur action, les douanes contribuent également à la compétitivité des entreprises. Je souhaite évoquer, parmi de nombreux chantiers, le déploiement et la modernisation des systèmes de dédouanement électronique sur les dernières décennies. Ce sont autant de procédures simplifiées qui, notamment, ont permis de réduire les délais et les coûts pour le secteur privé.
Je retiens un chantier qui a fait date : la digitalisation ayant réussi l’ancrage de la dématérialisation de l’ensemble du processus de dédouanement. Comme je citerai “PortNet”, le programme de modernisation des procédures douanières qui prit forme grâce à l’EDI (Echange de Données Informatisées). Doté d’une plateforme informatique, il a simplifié les formalités douanières, accéléré le temps d’importation et d’exportation, et minimisé les coûts logistiques du secteur privé. En conséquence, “PortNet” a renforcé l’efficacité des opérations de commerce extérieur dans les ports du Royaume.
Aujourd’hui, le projet le plus en vue est celui de la mise en place de la “Zone de prospérité postale” initiée précisément par l’Organisation mondiale des douanes (OMD). Une plate-forme qui sera dédiée aux envois destinés à être expédiés au centre national de dédouanement postal de Casablanca, pour être dédouanés et introduits dans le système postal national.