Khalid Chegraoui, professeur d’histoire et d’anthropologie politique éclaire sur les enjeux de l’enseignement à distance et s’il peut être considéré comme un élément structurel du système éducatif marocain.
Pour un pays comme le Maroc, l’enseignement à distance constitue-t-il un atout ou un risque ?
C’est même devenu une évidence et une exigence, étant donné la situation générée par la Covid-19. De plus, l’enseignement à distance a toujours été pratiqué, certes de manière limitée, pour des formations continues et certaines diplomations professionnelles, qui ne stipulent pas de présence obligatoire, sauf un travail assidu, de cours et d’exercice, avec un système d’évaluation aussi à distance, ce qui a été fait dans les années 70 et 60 du XXème siècle avec des institutions nationales et étrangères. Ce système a permis un développement de beaucoup de capacités personnelles de petits et moyens cadres ainsi que le développement des rendements. Alors qu’aujourd’hui, avec les moyens de communication et de travail dont on dispose, et vu la situation de pandémie et, peut-être, d’autres catastrophes auxquelles il faut s’attendre, je trouve que l’enseignent à distance doit impérativement faire partie des cursus, crise ou pas crise. Ce qui demandera une nouvelle approche pédagogique et didactique et des formations adéquates. Et, d’un autre côté, il faudra revoir nos curriculums et nos systèmes d’évaluation et de notation des examens finaux, vers moins de sanctions, pour plus de rendements, à travers des approches par compétences et des classes inversées… Ce qui donnera plus d’opportunités à l’apprenant de développer sa créativité, ses capacités d’innovation et de réflexion par lui-même…
Ce mode d’apprentissage doit-il être considéré comme un élément structurel du système éducatif marocain ou seulement une réponse conjoncturelle au contexte de crise, comme c’est le cas avec la Covid-19 ?
Il faudra sûrement l’institutionnaliser et pour toujours. La crise de la Covid-19 est certainement une catastrophe, mais qui aura à nous pousser à prendre un nouveau virage, au moins dans le secteur de l’enseignent qui, comme beaucoup d’autres secteurs, en aura pâti. Car, plus que l’économie et autres secteurs, la paralysie de l’enseignement aura un impact très négatif sur les enfants et les jeunes, l’avenir de toute la société, en somme, du fait du confinement et de ses relations complexes imposées à la structure familiale et la société en général. Cette institutionnalisation impose de nouvelles structures et de nouveaux procédés, car cet enseignement, à part ses exigences matérielles, pour l’institution comme pour l’apprenant, qui ne sont nullement une entrave, nécessite une nouvelle approche didactique et pédagogique qui doit être inculquée dans les centres et les institutions de formation et d’enseignement.
Ce nouveau cadre exige, aussi, de nouvelles formes de partenariat public- privé avec intégration des centres de réflexion et des universités, comme il demande une meilleure compréhension et confiance en la jeunesse et en ses capacités d’adaptation et de maîtrise des nouvelles techniques et des moyens de communication, comme cela demandera plus d’engagement de la part des communes et des acteurs civils, avec un retour obligé de la responsabilité familiale, car l’éducation est sa fonction quand l’instruction est le fait des structures de l’enseignement et de l’Ecole.