Ecrit par Soubha Es-Siari |
La 6e rencontre annuelle des agents et courtiers d’assurance tenue cette année sous le thème « l’avenir du métier de l’intermédiaire d’assurances, solutions innovantes face à un marché en pleine mutation » a permis aux compagnies et aux intermédiaires d’assurance de lancer la réflexion sur comment permettre à la profession de relever les défis pressants d’un contexte empreint d’incertitudes et ce dans un esprit de partenariat win-win.
Le choix du thème de cette 6e rencontre annuelle des agents et courtiers d’assurance n’est pas fortuit mais rappelle que l’intermédiation en assurance, à l’instar d’autres métiers et d’autres professions, fait face à de vrais challenges et qu’elle n’est pas à l’abri des transformations technologiques que connaissent, depuis une dizaine d’années les économies.
En sus des problèmes propres aux agents et courtiers d’assurances, d’autres se rapportant aussi bien au commissionnement qu’ à celui des créances ou impayés, liés à la relation entre les deux catégories pèsent lourdement sur les intermédiaires.
Voir également : [Podcast] TVA sur commissions : la FNACAM ne va pas lâcher prise
Le président de la FNACAM, Farid Bensaid, a annoncé que de prime abord la fédération a besoin de légitimité afin qu’elle puisse renforcer ses rangs et défendre les intérêts de ses membres. A ce titre Khalil El Alamy, président par intérim de l’ACAPS répond que la FNACAM est aujourd’hui la seule association professionnelle des intermédiaires qui a fait approuver ses statuts et donc reconnue par le régulateur. Allusion faite à l’UMAC qui a presque disparu des radars.
Les bonnes intentions ne nourrissent pas les intermédiaires
Farid Bensaid rappelle dans la foulée la concurrence déloyale des bureaux directs créés par les compagnies d’assurance et qui bouffent une bonne partie des commissions des intermédiaires censés être les partenaires privilégiés. Bachir Baddou, DG de la FMSAR rétorque que les bureaux directs sont créés pour répondre aux besoins des populations des zones reculées. C’est aussi un moyen de contourner les lacunes relatives à l’examen d’aptitude en l’absence du livre IV.
Bensaid exhorte par ailleurs la profession à trouver une solution définitive au problème des créances qui ne font que s’accumuler et appelle également à la sortie du livre IV qui est toujours perdu dans les méandres du circuit législatif. « Le livre IV est considéré comme le code de la route pour la profession et donc elle ne peut continuer à naviguer sans ce livre », rappelle Farid Bensaid. Pour le régulateur, le livre IV est dans sa mouture finale et prend en considération les changements opérés dans le temps.
Pour ce qui est de la problématique de la TVA ou de la taxe sur la taxe supportée depuis de longues années indûment par les intermédiaires, il est annoncé qu’elle n’est pas à l’ordre du jour et que 2024 sera sans aucun doute une année de TVA.
Pour faire court, le président de la FNACAM explique que l’intermédiation pour pouvoir survivre à tous ces vents contraires qui soufflent a besoin de concret et non pas de bonnes intentions. « Les bonnes intentions ne nourrissent pas », martèle F. Bensaid.
Les chiffres sont têtus
Au moment où le président de la FNACAM brosse un tableau noir avec des chiffres inquiétants, le régulateur considère que les intermédiaires se portent bien et ce malgré la crise liée au Covid19.
En 2021, l’industrie de l’assurance a affiché des indicateurs très satisfaisants : 50 milliards de dirhams de primes émises et une croissance de près de 10% (au moment où le PIB a réalisé une croissance de 7,9%). Pour ce qui concerne la distribution, le secteur a versé 4 milliards de dirhams de commissions, en progression de près de 7% par rapport à 2020.
« Vous les intermédiaires d’assurances, vous représentez un réseau composé d’un peu plus de 2000 points de vente entre agents et courtiers. Vous restez le canal de distribution privilégié des assurés, devant les bancassureurs et les bureaux de gestion directe puisque vous drainez 57% de l’aliment de primes, contre 30% pour les bancassureurs et 13% pour les bureaux de gestion directe. Sur les 4 milliards de dirhams de commissions, vous recevez environ 3,6 Milliards soit 88% (le reste 12% va aux bancassureurs). Sur cette enveloppe (3,6 Milliards), 1,5 milliard de dirhams proviennent de l’Automobile, 367 millions de dirhams de l’assurance maladie et 310 millions de dirhams des accidents du travail », rappelle le régulateur.
Il alerte cependant que plus de 60% des commissions proviennent d’assurances obligatoires et donc à peine 40% des commissions proviennent d’assurances non obligatoires. Cette forte dépendance aux assurances obligatoires pourrait être considérée comme un facteur de risque.
Le risque le plus imminent est celui qui pèse sur l’assurance maladie (à court terme avec la généralisation de la protection sociale et le basculement de la population relevant de l’article 114 de la loi AMO vers la CNSS). « C’est pour vous dire que les Intermédiaires d’assurances sont appelés à sortir de leur zone de confort pour aller chercher les clients et développer les assurances facultatives. J’estime qu’il y a des gisements de croissance qui demeurent inexploités et qu’il appartient aux intermédiaires d’assurances avec l’appui des entreprises d’assurances de les développer », prévient Khalil El Alamy, président par intérim de l’ACAPS.
En matière de digitalisation, il est à noter que l’intermédiaire reste vaille que vaille le maillon indispensable dans la gestion des sinistres. A telle enseigne que les intermédiaires appellent à être rémunérés (honoraires) sur le conseil et ce dans le cadre d’un partenariat gagnant-gagnant. Le but étant que compagnies et intermédiaires aient leur part de la rentabilité et par ricochet un marché équilibré.