Ecrit par Soubha Es-Siari |
Le gouvernement a décidé d’adopter le RSU en 2023 au lieu de 2025. C’est ce qu’a annoncé Fouzi Lekjaa à l’occasion du Forum mondial de la protection et la sécurité sociale tenu cette semaine à la ville ocre Marrakech.
Avancer la date d’adoption du RSU n’est pas anodin mais atteste de l’amenuisement des marges de manœuvre des pouvoirs publics au regard de tous ces vents contraires qui soufflent.
Face à un tarissement des ressources financières suite à la succession des crises (Covid, sécheresse, Conflit en Ukraine), les besoins de la population suivent un rythme exponentiel mettant à rude épreuve les finances publiques de l’Etat.
La hausse des cours des matières premières conjuguée à une sécheresse sévère ont mis en évidence toutes ces fragilités structurelles dont pâtit notre économie. Elles ont mis en exergue la nonchalance des équipes se succédant au pouvoir qui faute de courage politique n’ont pas eu l’audace de mener des réformes ambitieuses et déterminantes pour l’ensemble des citoyens.
Le stress hydrique que connait le Maroc aujourd’hui résulte certes du changement climatique ponctué par des sécheresses récurrentes mais également par l’absence de politique de l’eau efficace et efficiente. Il a fallu que la crise nous éclate à la figure pour lancer la réflexion sur les ressources non conventionnelles (eaux pluviales, dessalement d’eau, réutilisation des eaux traitées…). Et encore, sur le plan réglementaire, les lois régissant les eaux usées ne sont pas encore sorties. Sans omettre la question technique, parce ces projets sont conçus indépendamment des projets d’épuration.
Dans le même sillage, nous pouvons citer l’exemple de la réforme de la retraite qui a beaucoup traîné.
La réforme en deux pôles public et privé a été confiée en 2018 au cabinet Finactu à l’issue d’un appel d’offre du ministère des finances. Ses résultats devaient être dévoilés Ceteris Paribus vers fin 2019. Nous sommes fin 2022 et pas de résultats d’études.
Pour l’élargissement de la protection sociale, ce chantier titanesque et révolutionnaire comme préfèrent le décrire nos responsables, il est utile de rappeler que c’est l’initiative du Souverain que Dieu le glorifie. Sinon, nos gouvernements la tête dans le guidon n’y oseraient jamais l’entamer.
Et le niveau global de la protection sociale effective pour le Maroc continuera à se situer à des niveaux dérisoires soit 20,5 % alors que le taux moyen s’établit à 33,8 % au niveau des pays d’Afrique du Nord et à 46,9 % au niveau mondial.
Cela dit et pour ne pas enfoncer davantage le clou dans la ou les plaies, on va essayer de voir la moitié pleine du verre. Les crises ont poussé les pouvoirs publics à revoir urgemment leurs copies et adopter le RSU le plus tôt possible notamment pour mettre sur les rails le chantier de l’élargissement de la protection sociale.
Ils sont désormais conscients qu’il s’agit d’une action devant figurer parmi les priorités des politiques publiques pour en garantir l’efficacité, la cohérence et la complémentarité avec les autres composantes du programme de développement.
Dieu merci, les chiffres dévoilés dans l’enquête du HCP relatifs au basculement de 3,2 millions d’habitants supplémentaires dans la pauvreté et la vulnérabilité ont certainement éveillé les consciences.
Ainsi que ce soit la décompensation ou l’élargissement du système de protection sociale pour inclure les catégories de populations les plus vulnérables, les deux projets impliquent nécessairement un ciblage des bénéficiaires pour gagner en efficacité.
Le registre social unique se présente ainsi comme l’instrument le plus adapté pour une bonne gestion des ressources publiques destinées à la lutte contre la pauvreté et la vulnérabilité. Mais encore faut-il qu’il soit bien manié.
La réalisation de cet objectif reste évidemment tributaire de la disponibilité d’une base de données sociale exhaustive, cohérente et fiable intégrant les principales variables pertinentes pour la sélection des populations ciblées.
En somme, le RSU reste la panacée face à ce cocktail explosif de crises auquel fait face le Maroc avec pour toile de fond l’amenuisement des ressources financières.
Sans se leurrer, les résultats attendus demeurent en quelque sorte tributaires du degré de transparence et d’efficacité du mode de gouvernance du système, des méthodes de sélection des populations bénéficiaires et des mécanismes de suivi et d’évaluation des programmes mis en œuvre.
Sinon les mêmes erreurs produiraient les mêmes effets.
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