Ecrit par la Rédaction I
Le programme d’aide aux logement tellement attendu a pris forme depuis la présentation des grandes lignes à SM le Roi en Conseil des ministres et l’adoption du décret n° 2.23.350 en conseil de gouvernement avant d’atterrir dans le circuit de validation. L’importance d’un tel programme suscite néanmoins certaines appréhensions sur les modalités d’octroi, l’exclusion de certains types de logement ou encore des délais très serrés. Les détails.
Depuis la présentation des grandes lignes à SM le Roi en Conseil des ministres et l’adoption du décret n° 2.23.350 en conseil de gouvernement avant d’atterrir dans le circuit de validation, et entre les deux, une conférence de presse de la ministre Mansouri, le programme d’aide au logement suscite beaucoup d’intérêt et doit répondre à de grandes attentes.
Avec à la clé, 9,5 milliards de dirhams qui seront mobilisés en 2024 par l’État pour financer le programme dont la mise en œuvre démarrera à partir du 1er janvier 2024.
Ce nouveau programme qui sera étalé sur la période 2024 – 2028 vise à renouveler l’approche liée à l’accès à la propriété en soutenant directement le pouvoir d’achat des ménages, à travers une aide financière directe.
Et qui dit aide, dit conditions d’éligibilité, procédures d’octroi et montant de l’aide.
Dans ce sens, l’Observatoire du travail du gouvernement (Otrago) a élaboré un rapport sur la nouvelle procédure liée à l’aide au logement, à travers lequel il a essayé d’évaluer cette subvention et sa capacité à fournir les résultats escomptés, notamment en ce qui concerne le soutien du pouvoir d’achat des citoyens, l’amélioration de l’offre de logements et la relance du secteur immobilier et de la construction.
Le rapport tout en rappelant le contexte de la réforme et la nouvelle procédure qu’elle implique a analysé les points de force et de faiblesse de ce programme et des écueils qu’il faudra revoir pour ne pas en limiter l’efficience.
Ainsi et à travers le suivi des différentes étapes d’élaboration du nouveau programme d’aide au logement, l’Observatoire de l’action du gouvernement a enregistré un ensemble de constats :
De prime abord, OTRAGO souligne le caractère positif de la nouvelle approche en vigueur, basée sur le soutien de la demande au lieu du soutien de l’offre, qui améliorera le pouvoir d’achat des citoyens, améliorera également la qualité de l’offre de logements et augmentera les choix pour les bénéficiaires.
De fait, le programme d’aide au logement induira un dynamisme économique dans le secteur immobiliser vital à l’économie, lui permettant ainsi de surmonter la crise de récession dont il souffre, avec à la clé un impact positif sur la croissance et l’emploi.
Autre point fort de ce programme tel qu’il a été conçu est de s’appuyer sur un prix fixe comme base d’octroi des aides, ce qui permettra d’élargir le bénéfice du logement, et de corriger les problèmes de justice spatiale en matière de logement, en permettant à toutes les régions du Royaume d’en bénéficier, soutient le rapport.
Sans oublier bien évidemment que ce programme n’exclut pas les Marocains résidant à l’étranger.
Ceci étant, OTRAGO relève plusieurs interrogations particulièrement le budget limité alloué au soutien au logement sur une base annuelle, qui est fixé à 9,5 milliards de dirhams, jugé limité ce qui réduit le rythme de réalisation à 70.000 logements chaque année, sachant que le déficit de logements dépasse largement ce chiffre.
Par ailleurs et malgré le décret approuvé par le conseil du gouvernement début novembre, cela ne dissipe pas l’ambiguïté de la procédure liée au rattachement du bénéfice de la subvention aux logements disposant d’un permis de logement délivré en 2023. Selon le rapport, cette disposition risque de limiter le choix du logement, voire augmentera les prix des logements couverts par la subvention compte tenu du déficit de l’offre de logements, en particulier pour la classe moyenne n’ayant jamais bénéficier de soutien aux logements.
Autre disposition qui suscite l’incompréhensible est celle limitant la subvention à l’acquisition d’appartements, excluant du périmètre d’aide au logement les opérations personnelles de construction sur terrain, alors que c’est une pratique encore possible dans d’autres régions du Maroc et au même prix précisé pour la subvention.
Idem pour l’activation du programme au profit du rural, la procédure exigeant le permis d’habiter fixée pour l’année 2023, sans aucune considération de la nature de la construction et de l’habitation dans ces zones.
Autre point procédural qui semble inquiété Otrago est celui du délai fixé à 30 jours pour réaliser la vente, afin de bénéficier de la subvention, sachant que la lenteur des démarches administratives et l’incompatibilité des démarches bancaires constitueront sans aucun doute un obstacle majeur à l’obtention de cette subvention.
Le dernier point soulevé par le rapport concerne l’absence de tout engagement de la part du gouvernement à activer les mécanismes de garantie des banques afin de s’engager dans le financement du logement au profit des personnes aux revenus limités pour acquérir un logement.
Bien évidemment pour éviter que ces zones d’ombres ne se transforment en écueils ou freins à l’efficience de ce programme, l’Observatoire du Travail du Gouvernement a élaboré nombre de recommandations.
Particulièrement, la nécessité d’imposer des mécanismes de contrôle stricts en ce qui concerne le respect des projets de développement dans les zones urbaines et rurales, le contrôle de la qualité de la construction et la lutte contre les phénomènes de « noir » et de profit illégal de ce programme, en particulier pour les promoteurs immobiliers. C’est une condition sine qua none pour éviter les contraintes subites par les acquéreur en raison de certaines pratiques à prohiber.
Par ailleurs, la tutelle devrait réfléchir d’urgence à des solutions appropriées aux obstacles et déséquilibres administratifs et financiers qui peuvent survenir en raison du délai de 30 jours pour finaliser la vente, d’autant plus que la plupart des acheteurs de maison se tournent vers les banques pour obtenir du financement.
Aussi, est-il nécessaire de clarifier la compatibilité des mécanismes pour bénéficier de la subvention avec la nature de la construction dans le monde rural, notamment la date de dépôt du permis d’habitation.
Bien évidemment, il est de notoriété publique que le secteur bancaire joue un rôle important dans l’acte d’acquisition d’un logement et il manque au projet de décret 2.23.350 de prévoir des mécanismes de garantie par l’État au profit des banques afin de faciliter l’accès au financement des personnes aux revenus limités. Plus encore, l’État doit de trouver les moyens d’inciter les banques à s’engager fortement dans le soutien au programme et d’accélérer les procédures de financement.
Pour Otrago, le succès d’un tel programme reste tributaire de l’accompagnement et souligne dans son rapport l’importance d’accélérer l’émergence d’agences régionales de reconstruction et de logement, en tant que mécanismes nécessaires pour contrôler le rythme du programme et suivre ses réalisations, et pour renouveler la planification urbaine, que ce soit dans la sphère urbaine ou rurale.
Et comme pour tout programme adressé directement aux citoyens, la tutelle gagne à multiplier les campagnes de communication et d’orientation concernant le programme et ses différentes procédures et conditions pour en bénéficier, compte tenu de la prévalence d’un ensemble de fausses informations diffusées sur le programme, notamment sur les réseaux sociaux.
En guise de rappel, les montants de l’aide directe sont répartis comme suit: 100.000 DH pour l’acquisition d’un logement dont le prix de vente ≤ 300.000 DH TTC et 70.000 DH pour l’acquisition d’un logement dont le prix de vente >300.000 DH TTC et ≤ 700.000 DH TTC.
Les conditions d’éligibilité selon la ministre de l’habitat sont les suivantes :
- Être de Nationalité marocaine ;
- le demandeur ne doit avoir bénéficié d’aucun avantage accordé par l’État en matiére de logement et ne pas être propriétaire, à la date de l’acquisition, d’un bien immobilier destiné au logement ;
- Le compromis de vente doit être passé par devant notaire et le logement doit disposer d’un permis d’habiter daté du 01 janvier 2023 et faire l’objet d’une première vente.