Ecrit par Lamiae Boumahrou |
L’exécution du nouveau mécanisme d’aide aux logements (en cours d’achèvement) requiert la mobilisation de tous les acteurs y compris le bras armé de l’Etat à savoir Al Omrane. Malheureusement, la Holding souffre de plusieurs maux et devrait opérer une mise à niveau urgente. En attendant plusieurs opérateurs du BTP continuent d’agoniser à cause des retards de paiement qu’accuse la Holding.
Après plus de 3 ans d’attente, le nouveau mécanisme d’aide aux logements, tant attendu, semble arrivé au bout du tunnel. Déposé au niveau du Secrétariat général du gouvernement (SGG), le projet sera prochainement discuté en Conseil de gouvernement pour une application dès la prochaine loi des finances.
Mais au-delà des détails de ce dispositif qui n’ont pas encore été officiellement dévoilés, une question s’impose sur l’exécution de ce nouveau dispositif. Outre les promoteurs privés qui s’intéresseront à cette catégorie de logement, l’Etat dispose de son bras armé pour réussir ce chantier national à savoir Al Omrane.
Sauf que ce bras armé de l’Etat souffre de plusieurs maux. Le récent communiqué du dernier Conseil de Surveillance du Groupe Al Omrane, tenu ce 26 juin, en dit long sur cette institution qui est souvent pointée du doigt.
En lisant entre les lignes du communiqué du ministère de l’Aménagement du Territoire National, de l’Urbanisme, de l’Habitat et de la Politique de la Ville, Al Omrane devrait secouer son cocotier.
Al Omrane a été appelé par la ministre de tutelle à redynamiser davantage son action pour améliorer son efficacité opérationnelle et à carrément revoir sa stratégie et son action.
Un constat qui confirme les dires du ministre du Budget, Fouzi Lekjaa, qui avait critiqué en novembre 2021 devant la Commission des Finances la gestion de la Holding évoquant même l’éventualité de privatiser Al Omrane.
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Depuis, c’est silence radio quant à l’avenir de la holding. Et pourtant, il aurait fallu entreprendre une mise à niveau avant même le lancement du nouveau mécanisme d’aide au logement et ne pas attendre la veille de son entrée en vigueur pour appeler à une révision de la stratégie et de la politique d’Al Omrane.
Ceci dit, les faits sont là et la holding continue de traîner derrière elle ses veilles casseroles. Parmi ces casseroles, le non-respect des délais de paiement. En effet, bien que l’Etat ait mené une guerre contre les retards de paiement depuis la réforme de 2018, Al Omrane ne s’y est pas réellement appliqué. Le groupe figure parmi les EEP ayant déclaré les délais les plus longs (90 jours à fin mars 2023). Etant l’un des plus grands ordonnateurs de la commande publique du secteur, les conséquences de ce retard sur les opérateurs du secteur sont très pesantes.
Dans un article publié en janvier 2023, EcoActu.ma mettait la lumière sur l’agonie des opérateurs du BTP face à un donneur d’ordre qui n’honore pas ses engagements. « Certes nous souffrons de retards de paiement avec bon nombre de donneurs d’ordre. Mais c’est surtout avec Al Omrane que nous souffrons le plus. L’entreprise est à l’origine de la faillite de plusieurs entreprises », nous avait confié un membre de la FNBTP.
7 mois plus tard, nous apprenons qu’Al Omrane n’a pas encore assaini sa situation envers les opérateurs dont bon nombre ont été contraints de mettre la clé sous le paillasson, assure une source ayant requis l’anonymat. Rappelons que les dettes de la Holding se chiffrent en centaines de millions de DH.
Nous apprenons également de notre source qu’après plusieurs réunions tenues avec les opérateurs du BTP, Badr Kanouni, l’ancien Président du Directoire du Holding Al Omrane, avait promis de débloquer la situation afin de sauver ce qui reste à sauver. Malheureusement, à ce jour la situation reste inchangée.
Selon notre source, la région qui s’accapare la plus grande part des dettes est celle de Oujda. « C’est là région où les dettes d’Al Omrane sont les plus concentrées et où les entreprises du BTP souffrent le plus. Plusieurs entreprises agonisent si ce n’est elles ont déjà disparu à cause d’Al Omrane Oujda », nous affirme notre source.
Il semble même qu’une entreprise de BTP au niveau de la région ait saisi par voie de la justice les comptes et les biens d’Al Omrane Oujda. Une information que nous n’avons pas pu confirmer auprès d’Al Omrane.
Ce qui est certain, pour relever le nouveau défi que l’Etat s’est fixé en matière de promotion de logement, le bras armé de l’Etat doit revoir ses copies. Et autant dire que Housni El Ghazaoui, nommé président du directoire du Groupe d’Aménagement Al Omrane en mai dernier à l’issue du Conseil des ministres présidé par SM le Roi, hérite d’une situation peu confortable.
Espérons que l’Agence Nationale de Gestion Stratégique des Participations de l’Etat et de suivi des performances des établissements et entreprises publics aura son mot à dire.
Rappelons que parmi les objectifs de cette Agence pilotée par Abdellatif Zaghnoun, également présent au Conseil de surveillance d’Al Omrane, est de restructurer les EEP, de valorisation des participations de l’Etat et d’amélioration de leurs performances en vue de faire de ce secteur un moteur de développement économique et une locomotive pour le secteur privé.