Destinée à la région de Casablanca, la station de dessalement d’eau de mer récemment adjugée au voisinage de 4,50 Dh/m³ produira 200 millions de m³ d’eau potable annuels et comportera une extension de 100 supplémentaires.
La technologie retenue pour alimenter la station de dessalement d’eau de mer de Casablanca est « l’osmose inverse » qui est une technologie de filtration par membrane qui fonctionne en forçant l’eau sous une pression dépassant qui doit dépasser les 30 atmosphères pour passer à travers les minuscules pores d’une membrane semi-perméable. Un système d’osmose inverse comporte donc une entrée (l’eau de l’océan) et deux sorties (de l’eau douce qui est collectée et de l’eau chargée en sel qui rejetée dans l’océan). Pour chaque m³ d’eau douce produite, on collecte environ 2.5 m³ d’eau au large de l’océan et on rejette 1 m³ d’eau chargée en sel au large dans l’océan. Elle nécessite aussi de l’électricité :
- pour apporter l’eau de l’océan d’une grande distance,
- pour créer la pression d’osmose,
- pour rejeter dans l’océan l’eau chargée en sel à une grande distance.
Même sur la base de 4 kWh/m³, son pompage et ses osmoseurs nécessiteront 800 GWh d’électricité annuels, soit moins de 2% de l’électricité nette appelée par tout le pays en 2023 (~43’000 GWh).
Pour compenser ou produire ces 800 GWh d’électricité, on peut, à loisir, utiliser :
- un parc éolien de 260 MW qui nécessiterait un investissement de 3,9 milliards de Dh, et produirait pour environ 0,25 Dh/kWh là où les facteurs de charge atteignent 35%,
- une ferme solaire photovoltaïque classique de 434 MWc qui nécessiterait aussi un investissement de 3,9 milliards de Dh, et produirait pour environ 0,25 Dh/kWh là où les facteurs de charge atteignent 21%,
- une centrale électrique « non intermittente » d’une puissance théorique de 122 MW avec un facteur de charge de 75% qui, elle-même pourrait être :
- au charbon, qui nécessiterait un investissement de 1,8 milliards de Dh, et produirait pour environ 0,60 Dh/kWh quand le charbon est au plus bas, mais qui est le plus polluant en émettant 0,95 kg d’équivalent CO2 par kWh produit,
- au fuel, qui nécessiterait un investissement de 1,6 milliards de Dh, et produirait pour environ 1,50 Dh/kWh quand le pétrole est au plus bas, mais qui émettrait 0,77 kg d’équivalent CO2 par kWh produit,
- au gaz naturel, qui nécessiterait un investissement de 2,0 milliards de Dh, et produirait pour environ 0,50 Dh/kWh quand le gaz naturel est au plus bas, qui émettrait 0,37 kg d’équivalent CO2 par kWh produit,
- à fission nucléaire, dont l’électricité est décarbonée, même s’il n’y a encore toujours pas encore d’information crédible et transposable sur le coût de l’électricité générée à cause d’investissements qui se démultiplient partout :
- chaque réacteur nucléaire conventionnel a une puissance unitaire supérieure à 1’000 MW qui, avec plus de 6’600 GWh annuels permettrait d’alimenter, à lui seul, plus de 8 stations comme celle de Casablanca, trop même pour le Maroc d’aujourd’hui quel que soit le prix du kWh, sans même compter qu’il faut dédoubler le réacteur,
- les petits réacteurs modulaires (SMR), permettraient, en théorie d’assurer la compensation avec la puissance requise mais ils ne font pas encore partie des technologies matures et connaissent de gros déboires dans leur stade expérimental, (voir NuScale Power).
En résumé, les options existantes de production (ou de compensation) de l’énergie appelée par la station de dessalement par du solaire ou de l’éolien coûteraient au moins le quart du prix actuellement facturé mais ceci ne représente que le coût énergétique alors les coûts non énergétiques du dessalement sont les plus élevés (osmoseur, pompes et équipements annexes et toute la maintenance incluant filtres, minéralisation de l’eau et autres).