Ecrit par Imane Bouhrara I
A plus d’une semaine d’intervalle, deux actualités d’apparence n’ayant rien à voir l’une avec l’autre, marquent le tissu économique marocain dans ce sens où la première est la publication du Global Financial and Economic Crime Outlook 2025 qui jauge la vulnérabilité des pays face à la criminalité économique et financière et la deuxième étant le démantèlement d’un réseau de sociétés écrans pour émettre de fausses factures, obtenir des crédits et toute une panoplie des faits répréhensibles par la loi.
Hasard du calendrier ou un signe d’une vaste purge ou juste un fait isolé, en tout cas, la problématique de la criminalité économique et financière a fait la Une ces derniers jours et mérite bien évidemment vu l’importance du sujet de s’y attarder ne serait-ce que l’espace de ce filet que vous êtes en train de lire.
D’emblée, le classement du Secretariat Economic Crime Index place le Maroc à la 75e position sur 177 pays, avec un score de 2,14 sur 4 dans l’indice des délits économiques, du blanchiment d’argent et du crime organisé. Notre pays se retrouve de ce fait dans la catégorie des pays vigilants qui inclut de grandes économies, deuxième groupe après celui des pays transparents et juste avant la 3e catégorie des pays faiblement organisés ou engagés dans la lutte contre les crimes économiques et la LBCFT. Sans oublier la dernière catégorie des retardataires.
C’est une position honorable vu la complexité du sujet mais néanmoins largement insuffisante pour un pays fortement engagé dans plusieurs réformes réglementaires pour lutter contre le blanchiment d’argent, contre la fraude, pour améliorer l’environnement des affaires et assurer une équité face au fisc, entre autres efforts fournis par le pays dans ce sens dans sa lutte contre la criminalité économique et financière.
Bien évidemment, le Global Financial and Economic Crime Outlook 2025 salue les efforts du Maroc et formule des recommandations, mais on sait bien qu’il est plus facile de proposer que d’œuvrer au changement et qu’il faut un temps pour améliorer certains indicateurs. Ce n’est nullement là un prétexte pour ne pas y aller franco. Pour un pays qui cible les investisseurs internationaux très frileux, l’amélioration de ces indicateurs est plus qu’impérative.
A noter que ce type de criminalité menace le tissu économique dans son ensemble, puisqu’il est nuisible aux ambitions de croissance et de développement, à l’efficience du tissu productif, il favorise l’opacité et n’est que la partie visible de l’iceberg d’autres formes de criminalité encore plus graves et menaçantes.
Pour revenir au réseau de sociétés écrans, ce coup de filet est à la fois important et rassurant dans le sens où il émet un signal fort que les autorités travaillent ensemble et demeurent vigilantes malgré l’évolution du cadre réglementaire.
Après, il ne faut pas s’arrêter en si bon chemin, d’autant que l’économie nationale souffre d’autres tares, qu’une purge au final ne serait pas de refus.
Dans ce sillage, beaucoup d’experts estiment que le recours aux nouvelles technologies comme l’intelligence artificielle ou la blockchain, peuvent être un outil fiable pour débusquer ce genre de pratiques et renforcer les mécanismes de lutte.
Ceci étant la criminalité économique et financière tangible ne doit pas occulter d’autres phénomènes encore plus néfastes tel qu’accéder à des avantages et privilèges indus ou le commerce d’influence alors que d’autres entreprises triment, une forme de concurrence déloyale qui met à mal le tissu économique et frustrent les opérateurs loyaux.
Mais c’est là une autre paire de manche.