Ecrit par Imane Bouhrara I
Voilà six mois que SM le Roi Mohammed VI avait adressé une lettre au Chef du gouvernement relative à la réforme du Code de la famille… 20 ans jour pour jour après la promulgation de la loi n° 70-03 portant Code de la Famille.
Le Souverain avait confié le pilotage de la préparation de cette importante réforme de ce texte révolutionnaire, de manière collective et collégiale, au ministère de la Justice, au Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire et à la Présidence du Ministère public en raison de la centralité des dimensions juridiques et judiciaires de cette question.
Il faut reconnaître que la machine s’est immédiatement mise en marche pour entamer les réunions préparatoires avant de démarrer les consultations.
Bien évidemment, nous sommes loin du contexte de l’avènement du code de la famille après le bras de fer de la réforme de la Moudawana et du travail réalisé à l’époque par la commission présidée par feu M’Hamed Boucetta, mais il faut reconnaître que les résidus de l’archaïsme et le primitif dans notre société, subsistent au-delà de ce qui est désormais tolérable.
Dès le démarrage des consultations, cette nouvelle réforme a été au cœur de la campagne de désinformation, de dénigrement portées par les réseaux sociaux et manquant de toute logique qui révèlent au final que ce n’est pas parce que nous sommes au 3e millénaire que la résistance à l’accès des femmes à leurs droits, à l’égalité et à la justice a disparu. Bien au contraire, des néo-machistes ont poussé un peu partout, souvent en avançant l’argument religieux.
Et pourtant, en 2003 comme en 2024, le cadre reste immuable, puisque le Roi en tant que Commandeur des Croyants ne peut autoriser ce que Dieu a prohibé, ni interdire ce que le Très-Haut a autorisé. Et puis ceux qui tiennent cet argument ignorent certainement la place de la femme en Islam.
De même que la réforme du Code de la famille ne signifie pas légiférer en faveur de la femme au détriment de l’homme. Sans oublier que cette réforme doit également autre plus révolutionnaire du moins autant que ne l’a été la Constitution de 2011.
Dans ce sens où les textes se retrouvent en retard avec l’évolution de la société, avec l’évolution du degré de conscience et de perception des droits (mariage des mineur à titre d’exemple) et nourrissent encore l’injustice.
Pis encore, des femmes leaders, autonomes, indépendantes, travailleuses, pionnières, des femmes fortes… se retrouvent souvent, une fois en contact avec la loi, aux prises avec un alinéa dans un texte datant d’avant ou après l’indépendance qui la réduit au statut de « mineur » ayant besoin de la tutelle du mâle de la famille. Voyons !
Au bout de six mois, ce n’est pas tant le respect des délais qui importe le plus, mais la teneur des propositions et des pistes de réforme d’un texte jadis révolutionnaire mais qui aujourd’hui devra résolument passer à la vitesse supérieure et remédier à des aberrations qui ne tiennent ni de la religion ni du droit. Et surtout promouvoir la pleine participation de la femme dans notre société, un manque à gagner qui se chiffre en point de PIB. Une participation en berne en raison notamment de la pandémie.
Pour les étapes suivantes, les Hautes Instructions Royales stipulent de soumettre les propositions d’amendements qui vont émaner des larges consultations participatives à la Haute appréciation du Roi dans un délai maximum de six mois, nous y voilà, et ce, avant l’élaboration par le gouvernement du projet de loi à ce sujet et sa soumission au parlement pour adoption.
Nous y sommes presque. Et comme il y a 20 ans, il est utile de réitérer : Nous avons trop attendu pourvu que le résultat soit à la hauteur de nos attentes.