Ecrit par la Rédaction I
Au Maroc, la situation semble tenable et n’appelle pas une appréhension particulière. Les équilibres financiers du budget ont été maintenus à des niveaux soutenables malgré l’emballement relatif qu’a connu l’endettement public durant les années 2010, le déficit budgétaire qui était de 7,2% du PIB a été ramené progressivement à 3,6% en 2019. Tel est le constat dégagé par les économistes du CMC.
Au cours des deux dernières décennies, l’économie planétaire a traversé une foultitude de risques remettant en cause les fondements de base de la politique économique, considérés jusqu’alors comme solides et immuables.
Ainsi et à contre-courant des politiques d’austérité engagées sous la houlette du Fonds Monétaire International durant les années quatre-vingt et quatre-vingt-dix, un relâchement impressionnant de la politique budgétaire s’est manifesté pour contrecarrer les retombées néfastes de la crise et éviter au monde de sombrer dans une grande récession similaire à celle de 1929.
« Les critères habituellement imposés dans l’élaboration des budgets ont fait l’objet de profondes distorsions et les limites des ratios de gestion de la dette et du déficit considérées comme dangereuses à franchir ont été allègrement dépassées », annoncent les économistes du CMC.
S’agissant de la crise sanitaire du Coronavirus, cette crise délétère, meurtrière a mis à genoux toute l’humanité et a fait rentrer l’économie mondiale dans une dépression sans pareille.
Le nombre important de décès, la saturation des hôpitaux, l’abattement des professionnels de santé, la pénurie de médicaments auxquels il faut ajouter les répercussions économiques et sociales provoquées par la pandémie, ont montré l’impuissance et l’impréparation du monde face à ce genre de fléau, comme ils ont mis à nu la fragilité et l’incapacité du modèle libéral en vigueur pour la gestion économique adopté par la majorité des pays développés.
Ceci a poussé les États et les gouvernements à revisiter leur modèle sociétal et à corriger leurs orientations politiques vers plus d’État de coordination et de régulation.
Priorité à la relance face à la crise
Mieux encore, dans ce contexte récessif, la priorité a été accordée à la relance au détriment du maintien des équilibres quitte à aggraver encore plus le poids de la dette. Le Japon, le pays le plus endetté de la planète, a consacré un budget de 1900 milliards de dollars pour son plan de relance. Les États-Unis ont alloué une enveloppe de 2000 milliards de dollars pour réduire les effets de la crise sur les activités économiques et sur l’emploi.
La Chine, un des pays les plus affectés par la crise,a réservé un montant annuel de 950 milliards de dollars en 2020 pour stimuler la demande intérieure et lutter contre les poches de pauvreté. Au niveau de l’Europe, l’Allemagne a injecté dans l’économie 108 milliards de euros et la France et l’Espagne un montant équivalent.
L’assouplissement budgétaire s’est fait sciemment et sans se soucier, dans un premier temps, des répercussions négatives sur l’équilibre des finances et sur la dette. Il avait pour but, dans l’immédiateté, de venir à bout des effets de la crise sur les économies qui se trouvaient dans un état d’asphyxie et visait à court terme de maintenir le cap des différents programmes de relance en vue de parer à un retour de manivelle éventuel en de pareilles circonstances.
La dette globale a, en effet, atteint un niveau jamais égalé. L’endettement mondial s’est élevé à 238% du Produit Intérieur Brut soit 235.000 milliards de dollars en 2022 dont 91.000 milliards de dette publique. Les taux d’endettement ont connu une importante envolée et ce taux pour certains pays développés a même dépassé les 250 % du PIB mais sans aboutir à des défaillances.
La dette publique de l’ensemble des pays de l’OCDE qui représentait en moyenne environ 50% du Produit Intérieur brut au début des années 90 a culminé à 130% au milieu de l’année 2020.
Concernant le Maroc, la situation semble tenable et n’appelle pas une appréhension particulière. Les équilibres financiers du budget ont été maintenus à des niveaux soutenables malgré l’emballement relatif qu’a connu l’endettement public durant les années 2010, le déficit budgétaire qui était de 7,2% du PIB a été ramené progressivement à 3,6% en 2019. Et ce n’est qu’en 2020, année de crise, que le ratio dette publique sur PIB va atteindre 75,5% contre 65% en 2019 et que le niveau du déficit projeté au terme de l’exercice 2024 serait de 4,5%.
Certes, la politique budgétaire actuelle est entreprenante et recèle des programmes ambitieux pour soutenir l’activité économique et améliorer le niveau de vie et le bien-être social des ménages avec le lancement de grands chantiers pour l’édification de l’État social et l’engagement de grands projets d’infrastructures de base.
À la lecture du projet de loi de finances 2024, les dépenses d’investissement du budget au titre du présent exercice progresserait de 21%. Cependant cet activisme budgétaire demeure prudent et ménage les équilibres financiers et macroéconomiques réconciliant ainsi l’approche de relance avec la soutenabilité des finances publiques.