Ecrit par Lamiae Boumahrou |
Evoquant la question de la privatisation devant la Commission des Finances, Fouzi Lekjaa a fait allusion à une éventuelle privatisation d’Al Omrane qui permettra de secouer la holding d’une part et d’autre part de mieux contrôler la gestion du top management. Détails.
Au moment de l’adoption de chaque PLF se pose avec acuité la question du programme des privatisations qui, rappelons-le, a été suspendu depuis 2019 en raison de la crise sanitaire. Un programme entouré de beaucoup de mystère notamment par rapport aux biens qui seront cédés. Qu’a prévu l’Etat de vendre pour renflouer ses caisses ? Une question à laquelle le gouvernement n’y répond quasiment jamais notamment au moment de la discussion du PLF. L’Etat préfère gérer les dossiers de privatisation dans une discrétion totale.
Interpellée sur la question lors du point presse relatif à la présentation, la ministre de l’Economie et des Finances, Nadia Fettah Alaoui, n’y a pas dérogé à la règle en déviant la réponse sur la pertinence du choix qui sera fait au moment opportun et selon la maturité des actifs sans donner plus de détails sur les intentions de l’Etat.
Elle s’est contentée de préciser que l’Exécutif prévoyait un montant d’environ 8 Mds de DH pour ce programme et que l’arbitrage entre les actifs de l’Etat se fera en fonction des opportunités qui se présenteront.
La Holding Al Omrane : privatisée ou pas ?
Un peu moins mystérieux que Fettah, le ministre délégué auprès du ministère chargé du budget, Fouzi Lekjaa, s’est lâché devant la commission des Finances à la Chambre des représentants en effleurant indirectement un éventuel projet de privatisation. Il a tout d’abord tenu à préciser que le Maroc n’a, jusqu’à aujourd’hui, pas eu recours à la privatisation pour des considérations ou logiques budgétaires mais plutôt pour des considérations économiques.
Quant aux biens de l’Etat qui pourraient faire l’objet d’opération de privatisation, Fouzi Lekjaa a laissé entendre qu’Al Omrane pourrait figurer dans la liste des privatisables.
Le ministre délégué a critiqué le fait que l’Etat continue d’investir dans le secteur de l’immobilier. « L’Etat va-t-il continuer à acheter des terrains, construire, constituer des stocks et gérer les problèmes des invendus ? », s’est-il questionné.
Une question légitime eu égard à la situation de la Holding. Rappelons que le groupe Al Omrane a accumulé à fin 2020 un stock des invendus dont la valeur est estimée à 18 Mds de DH. Ce stock constitue une charge affectant l’équilibre financier du Groupe et atteste que de nombreuses catégories ne bénéficient pas des projets qui leur sont dédiés.
Aussi au premier semestre 2020, les indicateurs consolidés faisaient ressortir une baisse du chiffre d’affaires de 23% à 1,21 Md de DH contre 1,58 Md de DH au premier semestre 2019. C’est dire que la Holding Al Omrane passe par une conjoncture morose accentuée par la pandémie et ses conséquences économiques.
Le nouveau ministre délégué des finances n’y est pas allé de main morte notamment avec le top management de la holding en précisant que malgré ces problèmes, ce dernier « dormait » alors que le secteur privé cherche en permanence des opportunités d’investissement en Afrique et dans le monde.
« L’ouverture du capital de cette entreprise opérant dans le secteur du bâtiment au secteur privé a pour objectif de la rendre plus rentable d’une part. Et d’autre part cela permettra de la contrôler davantage afin qu’elle rende des comptes sur les salaires des employés, le parc auto… », a-t-il martelé.
Des accusations graves à l’encontre de la direction de la Holding Al Omrane qui, selon les dires du ministre délégué, pourrait faire l’objet d’opération d’ouverture de capital. Cet aveux du ministre délégué ne fait que confirmer l’impératif d’activer l’un des fondements de la Constitution à savoir la reddition des comptes. Un fondement qui, valeur aujourd’hui, reste lettre morte. A bon entendeur !