Ecrit par Soubha Es-Siari I
Face au changement climatique accéléré, le Maroc a tout intérêt à développer l’amont agricole de sa filière oléagineuse pour assurer sa souveraineté alimentaire. 99% des besoins du Maroc en oléagineux sont importés. Autrement dit, seul 1% est assuré localement.
Dans un contexte marqué par un changement climatique effréné, les oléagineux sont des piliers fondamentaux de l’économie. D’autant plus que chaque jour qui passe, le monde est menacé aussi bien par des contraintes climatiques que par des crises mondiales qui rendent urgente la mutualisation des efforts pour assurer la durabilité et la résilience de la filière des oléagineux. C’est dans ce cadre d’ailleurs que s’inscrit la 2ème édition des Rencontres Maghreb Oléagineux qui s’est tenue ce mercredi 6 mars à Rabat
Comme l’a si bien dit Mohamed Baraka, président de la Foléa dans son allocution d’ouverture : « que ce soient les crises liées au Covid19 ou celles liées aux conflits mondiaux, elles ont toutes mis en évidence la vulnérabilité face aux fluctuations des marchés internationaux ». La dépendance du Maghreb de l’importation des huiles alimentaires pose un sérieux problème en matière de souveraineté alimentaire.
Il considère tout de même que ces défis ne sont pas insurmontables. La présente rencontre se veut ainsi un moment de réflexion pour lancer les bases d’une coopération entre les pays de la région du Maghreb. Étaient présents à cette rencontre des représentants du Maroc, de l’Algérie et de la Tunisie armés de volonté pour relever les défis liés à la filière des oléagineux et ce malgré les différends politiques.
La présence de la France n’est pas fortuite mais en tant que pays ayant pu vaincre ce même type de problèmes, sa présence pourrait servir d’exemple aux trois pays leur permettant de s’abreuver de son expérience. « Ensemble nous pouvons réer un avenir plus résilient, la souveraineté alimentaire de notre région pourvu que nous soyons armés d’une volonté commune », annonce le président de la Foléa.
La situation n’est pas propre aux pays du Maghreb mais elle est mondiale avec pour toile de fond le changement climatique. Comme en attestent les chiffres : d’ici 2032, les surfaces de production végétale devraient diminuer en Amérique du Nord (-1,9%), en Europe et en Asie Centrale (-0,1%). Elles augmenteraient de façon limitée au Proche-Orient et en Afrique du Nord (2,3%) et de façon plus importante en Asie et Océane ainsi qu’en Afrique Subsaharienne (7,3%).
Autre indicateur important est que la demande alimentaire globale augmenterait dans le monde entre 2022 et 2031 de façon différenciée selon les zones géographiques. Dans les pays de l’OCDE, la demande des céréales serait de 10 MT, dans la Chine (4 MT), au Proche-Orient et en Afrique (93 MT).
En ce qui concerne les huiles végétales, la demande globale entre 2022 et 2031 s’établirait à 24 MT soit 3 MT OCDE, 4 MT (Chine) et 4 MT (Afrique Subsaharienne). Il s’agit globalement de besoins sans cesse croissants face à une production en nette baisse.
Dans un contexte pareil, le Maroc a tout intérêt à développer l’amont agricole de sa filière oléagineuse pour assurer sa souveraineté alimentaire. Ce postulat est le socle autour duquel la Fédération interprofessionnelle des oléagineux (FOLEA) a construit son Livre blanc. Un document qui renferme des conditions et fixe des orientations stratégiques pour le développement du secteur des oléagineux au Maroc.
Lors de cette 2éme édition, le débat porte sur la priorisation des territoires les plus propices à la culture des oléagineux et à une sensibilisation des agriculteurs à l’agrégation. À cela, s’ajoute l’amélioration des rendements grâce à un meilleur suivi technique et une meilleure conduite de la culture. Le tout assorti de la production de graines de meilleure qualité adaptée aux besoins de la trituration industrielle (avec un faible taux d’impuretés).
Aussi, l’encadrement à réaliser doit être effectué de manière structurée, en privilégiant en priorité les zones les plus favorables au développement des oléagineux. A rappeler qu’à fin 2021, l’estimation des superficies cultivées en bour est de près de 38.000 ha. Les objectifs de la filière consistent à réaliser une croissance annuelle moyenne de 11% pour atteindre l’objectif des 100.000 ha à horizon 2030.
La Fédération recommande par ailleurs d’orienter le développement des cultures oléagineuses en périmètre irrigué à travers des actions de sensibilisation et de formation. L’objectif étant d’améliorer l’attractivité de la culture pour les exploitations de taille petite à moyenne et utiliser les progrès apportés par le digital pour avoir un suivi en temps réel des parcelles en oléagineux. Si la FOLEA propose cette mesure, c’est que les résultats «mitigés» du contrat-programme sont principalement dus à un manque de moyens et d’accompagnement spécifique et rapproché. En plus, affirme la profession, la faible maîtrise des itinéraires techniques conduit à une production de graines de qualité médiocre.
La facilitation de l’accès aux semences certifiées produites localement est une mesure suggérée par les intervenants. Il s’agit, en effet, d’améliorer l’accessibilité des agriculteurs aux semences certifiées distribuées par l’agrégateur de sorte à accélérer leur adoption par les agriculteurs.