L’adoption et la signature de la Charte des médias, de l’environnement et du développement durable en octobre 2017, présageaient un ferme engagement de tous les signataires (pouvoirs publics, secteur privé, société civile, institutions de formations et médias nationaux) à faire du développement durable une priorité nationale.
Il était question de conjuguer les efforts pour permettre aux médias de jouer le rôle qui leur incombe dans cette lutte contre le changement climatique et dans ce processus de développement durable. Sauf que les bonnes intentions ne suffisent pas toujours pour opérer les vrais changements.
En effet, les engagements pris par les 30 signataires sont encore lettre morte. Preuve en est, les sujets environnementaux et climatiques sont de plus en plus absents du paysage médiatique. Un constat relevé par Amina Lemrini Elouahabi, Présidente de la Haute Autorité de la communication audiovisuelle (HACA) lors d’une intervention en marge d’une rencontre organisée par l’Association Ribat Al Fath sous le thème «L’environnement dans le paysage médiatique marocain ». Pis encore, un rapport réalisé par la HACA durant la COP22, révèle que les médias audiovisuels n’ont consacré au volet environnemental qu’une faible part. Chiffres à l’appui, la part des programmes environnementaux de la programmation générale des services télévisés n’ont représenté que 0,9% (2M), 3,6% (Al Oula) et 5,7% (Medi1 TV) avec une prédominance de la longue française avec 54%, 31,59% de l’arabe et 11,36% de l’Amazighe.
Pour changer cette donne et honorer les engagements pris par les différents signataires, Amina Lemrini Elouahabi, a appelé tous les acteurs à passer à l’action car c’est là où le bât blesse (Voir vidéo).
SM le Roi dans son discours inaugural de la COP22 avait insisté sur la nécessité d’un engagement actif envers la protection de l’environnement et a appelé à « rattraper le temps perdu » par une mobilisation continue et globale. Car tout simplement, il n’y a plus de temps à perdre face à l’accélération alarmante du changement climatique.
Rallumer la flamme de l’engagement environnemental
Malheureusement, malgré l’urgence et les risques que nous encourons, force est de constater que, passée la COP22, un relâchement de la mobilisation « environnementale » s’est fait remarquablement ressenti. D’où la question : la mobilisation que les différents acteurs avaient affichée en marge de la COP22 était-elle plus conjoncturelle pour ne pas dire un effet de mode ou une tendance que tout le monde souhaitait suivre?
Une question légitime étant donné que les sujets environnementaux sont relégués au second plan ou traités de façon sommaire. Or pour rallumer cette flamme de l’engagement environnemental et la pérenniser dans le temps, les médias ont un rôle primordial à jouer.
Le premier est celui d’informer et sensibiliser l’opinion publique. Relever les défis environnementaux n’est pas uniquement une affaire de l’Etat ou des politiques publiques, mais de toutes les composantes de la société : vieux, jeunes, hommes, femmes, riches, pauvres, citoyens, entreprises, société civile, sphère politique, médias…
L’enjeu n’est pas uniquement de rappeler aux décideurs politiques les engagements et les défis à relever dans ce domaine mais de sensibiliser les citoyens sur cette menace qui nous guette et sur leur part de responsabilité dans ce processus de lutte contre le changement climatique, de protection de l’environnement et de préservation des ressources naturelles.
Mais pour y arriver, il ne faut pas se contenter d’une simple communication superficielle et institutionnelle, mais aller plus en profondeur des sujets environnementaux par des enquêtes et en donnant la parole à la société civile, aux collectivités territoriales, aux secteurs privés, aux jeunes ainsi qu’aux experts environnementaux.
Contraintes à surmonter
Toutefois, pour contribuer à cet élan, et remplir dignement leur rôle, les médias doivent disposer des moyens technique, humain et financier. En effet, le gouvernement n’encourage pas les initiatives de contenu environnemental dans les médias ni sur le plan financier ni en matière de renforcement des capacités. Même constat pour le secteur privé, qui après la COP22 s’intéresse de moins en moins aux sujets environnementaux. Quant à l’accès à l’information, c’est une autre paire de manches. Ce droit constitutionnel n’est toujours pas un acquis ni pour les citoyens, ni pour les médias qui sont soit confrontés à l’absence de données et de statistiques soit à une rétention de l’information. C’est pourquoi l’accès régulier des médias à des informations fiables et actualisées ainsi qu’aux études et rapports pertinents en lien avec le sujet comme précisé dans la Charte est une condition sine qua non pour réussir à fédérer toutes les forces vives du pays autour du développement durable et de l’environnement.