Ecrit par S.E |
Après plus de 18 mois du lancement du plan de relance économique de 120 Mds de DH, le flou entoure le Fonds Mohammed VI pour l’investissement censé être un levier de taille pour amorcer un nouveau virage. Face aux objectifs ambitieux du PLF 2022, aussi bien ledit Fonds que le grand emprunt national suscitent des questionnements.
Depuis la publication du PLF 2022, une question revient sur toutes les lèvres : comment financer un programme aussi ambitieux ? Par quels moyens assurer la relance attendue après plus d’une année de crise sévère ? On aurait espéré avoir plus de précisions et de détails mardi dernier à l’occasion de la présentation du PLF2022 devant les médias et les députés. Mais vainement. Nadia Fattah Alaoui n’a pas convaincu les médias qui sont restés sur leur faim. Mais pas que.
Les analystes et observateurs sont par ailleurs dans l’attente de plus d’éléments de réponse sur le mode de financement d’un projet à forte connotation sociale.
La question du financement se pose avec acuité dans un contexte de raréfaction des ressources à cause des séquelles de la crise sanitaire qui sévissent encore de tout leur poids, une crise qui grippé tous les moteurs de la machine économique déjà en proie à des dysfonctionnements structurels.
Cette problématique des ressources revêt une grande importance dans la mesure où la présente équipe gouvernementale veille, vaille que vaille, à la préservation des équilibres macro-économiques. Autrement dit, elle ne souhaite pas laisser couler le déficit pour mettre l’économie sur les rails de la croissance économique. L’orthodoxie budgétaire restera à tort ou à raison l’alpha et l’oméga de toute équipe gouvernementale, bien que la ministre s’en défend lors de la conférence de presse.
D’autant plus que les institutions internationales très à cheval sur les équilibres macro-économiques, estiment que la maîtrise doit se faire de manière progressive et elle n’urge pas en ces temps de relance.
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Mais revenons à nos moutons. Il faut rappeler que l’équipe sortante avait promis comme instruments de relance, le Fonds Mohammed VI pour l’investissement (45 Mds de DH) pour servir de levier à l’égard du capital privé ainsi que le lancement de l’emprunt national pour financer les grands projets structurants.
Elle avait même laissé entendre que les deux chantiers avançaient à pas sûrs. Or à entendre les explications timorées de l’actuelle ministre de l’économie et des finances, on comprend parfaitement que les principaux ingrédients ne sont pas encore réunis et qu’il faut prendre son mal en patience.
Le recours à l’emprunt international serait à coup sûr l’alternative pour financer tous ces projets ambitieux arrêtés dans le PLF notamment les 245 Mds de DH de l’investissement public. Bien que le Maroc souhaite saisir la meilleure fenêtre de tir pour se manifester sur le marché international, une dette est une dette et ne peut que faire aggraver le taux d’endettement au risque de prendre en otage l’avenir des générations futures.
D’aucuns diraient que l’objectif d’un taux de croissance de 3,2% en 2022 est un signe avant-coureur que les objectifs annoncés dans le PLF 2022 seraient un vœu pieux. Un taux de croissance qui contredit le nouveau modèle de développement (NMD) censé être une feuille de route pour les équipes au pouvoir mais surtout en décalage avec l’engagement gouvernemental de 4 % de croissance.
Outre la volumétrie de l’investissement public, sa ventilation, sa répartition et son affectation suscitent des interrogations d’autant que la stratégie gouvernementale préconise l’Etat social. Comment dès lors sera-t-elle répartie entre relance économique et projets sociaux ? Ou plus précisément entre l’accompagnement des chantiers sectoriels (infrastructure, énergies renouvelables, dessalement de l’eau de mer …) et les projets sociaux qui cristallisent toutes les attentions ?
Aussi, le PLF 2022 reste-t-il muet sur la contribution du secteur privé dans l’investissement domestique. Une situation qui se reconduit d’année en année pour aboutir in fine à un indice ICOR (Taux d’investissement/taux de croissance) des plus importants de la région MENA.
Cet indice reflète la faible productivité des investissements pour un taux oscillant en moyenne autour de 30%. Pour des pays comme la Turquie, ce taux d’investissement génère une croissance économique de 6%. C’est d’ailleurs l’objectif du Maroc à horizon 2035. Là aussi une question que le gouvernement gagne à élucider, surtout sa méthode de dynamisation de l’investissement. Pur l’instant, nous restons dans les grandes lignes et les généralités, qu’il est difficile de faire un parallèle entre engagements du gouvernement et leurs déclinaisons sur le PLF.
Une chose est sûre : le Maroc est appelé à une transformation structurelle tangible de son économie pour s’inscrire dans une croissance durable et pérenne. Pour ce faire, il faut mettre le paquet sur l’industrialisation de son économie, investir dans la R&D, réduire le coût de l’énergie en accélérant le processus de développement des énergies renouvelables.
Dans cette mouvance, l’Etat est appelé à jouer le rôle de stratège, de facilitateur et d’orientateur. Le secteur privé est appelé à tirer à son tour la locomotive de la croissance. D’où la nécessité de revoir la composition de la structure de la formation brute du capital fixe qui porte en son germe plusieurs incohérences.
Dans ce sens, le gouvernement doit expliciter toutes les mesures à venir, les dispositions nécessaires pour cette transformation de l’économie pour que la classe économique puisse avoir de la visibilité et y adhérer.