L’exécution de la loi de finances au cours des cinq premiers mois de l’année en cours se déroule dans un contexte toujours marqué par la poursuite des pressions inflationnistes et le resserrement des politiques monétaires, au niveau aussi bien international que national.
En dépit de ce contexte, l’activité économique se serait légèrement accélérée comparativement à la même période de 2022, sous l’effet notamment d’un redressement de la valeur ajouté agricole, malgré une pluviométrie peu favorable, et le renforcement de l’activité hors agriculture, tirée notamment par le maintien du dynamisme du tertiaire soutenu particulièrement par les secteurs du transport et du tourisme.
La situation des charges et ressources du Trésor, à fin mai 2023, fait ressortir un déficit budgétaire de 24,6 Mds de DH, contre un déficit de près de 13,9 Mds de DH un an auparavant. Cette évolution recouvre une augmentation des dépenses globales (+15,6 Mds de DH) plus importante que celle des recettes (+4,9 Mds de DH).
Recettes
Les recettes ont enregistré, sur une base nette des remboursements, dégrèvements et restitutions fiscaux, un taux de réalisation de 39,4% par rapport aux prévisions de la loi de finances (LF). Comparativement à fin mai 2022, ces recettes se sont inscrites en hausse de près de 4,9 Mds de DH ou 4,1%.
Les recettes fiscales ont affiché un taux de réalisation de 42,8%. Par rapport à fin mai 2022, leur progression s’élève à près de près de 5 Mds de DH ou 4,8%. Les remboursements, dégrèvements et restitutions fiscaux, y compris la part supportée par les collectivités territoriales, se sont situés à près de 6,6 Mds de DH contre 7,4 Mds de DH.
Par nature d’impôt et de taxe, les principales évolutions ayant caractérisé les recettes fiscales à fin mai 2023, par rapport aux prévisions de la loi de finances 2023 et aux réalisations de la même période de 2022, se présentent comme suit :
- L’IS a enregistré un taux de réalisation de 39,7% et une baisse de 231 MDH (-0,9%). Cette baisse s’explique notamment par la diminution du complément de régularisation de 1,1 Md de DH et l’augmentation des restitutions de 741 MDH, compensées partiellement par l’amélioration des recettes issues du contrôle fiscal de 585 MDH et du 1er acompte de 217 MDH (9,1 Mds de DH contre 8,9 Mds de DH) ;
- L’IR a affiché un taux de réalisation de 48,8% et une hausse de 1,3 Md de DH (+5,9%) grâce notamment aux recettes générées par l’IR sur salaires (+1,1 Md de DH) ;
- Le taux de réalisation de la TVA à l’intérieur s’est situé à 42,2%. Ces recettes se sont améliorées de 1,6 Md de DH (+17,5%) dans un contexte marqué par une la progression de la consommation des ménages à 2,7% (1er trimestre 2023). Cette évolution de la TVA à l’intérieur recouvre une hausse des recettes brutes de 748 MDH et une baisse des remboursements de 835 MDH ;
- La TVA à l’importation, quant à elle, a affiché un taux de réalisation de 40,3% et une baisse de 160 MDH (-0,7%) et ce, en relation notamment avec les mesures prises pour soutenir le secteur agricole ;
- Les taxes intérieures de consommation ont enregistré un taux de réalisation de 38,4% et une progression de 404 MDH (+3,4%). Cette hausse est attribuable principalement aux TIC sur les tabacs (+329 MDH, +7,3%) ;
- Les droits de douanes ont été réalisés à hauteur de 39,8% et se sont inscrits en hausse de 488 MDH (+8,9%), en relation avec l’évolution des importations ;
- Le taux de réalisation des recettes au titre des droits d’enregistrement et de timbre s’est situé à 59,8%. Ces recettes ont progressé de 1,1 Md de DH (+12,9%), dont 797 MDH sont imputables aux droits d’enregistrement et 117 MDH aux droits de timbre.
Les recettes non fiscales, pour leur part, se sont établies à près de 12,4 Mds de DH se répartissant comme suit :
- Près de 3 Mds de DH en provenance des établissements et entreprises publics dont un versement de 2 Mds de DH de l’Agence nationale de la conservation foncière, du cadastre et de la cartographie et 526 MDH de Bank Al-Maghrib ;
- 9,4 Mds de DH au titre des « autres recettes » dont près de 5 Mds de DH au titre des financements innovants et 3,3 Mds de DH au titre des « produits divers » des ministères.
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Dépenses
Les dépenses ordinaires se sont établies à 125,9 Mds de DH, enregistrant un taux d’exécution de 43,2%. Par rapport à fin mai 2022, ces dépenses se sont accrues de près de 5,3 Mds de DH recouvrant une hausse des dépenses au titre des biens et services (+5,9 Mds de DH) et des intérêts de la dette (+1,8 Md de DH) et une baisse des charges de la compensation (-2,4 Mds de DH) :
- L’exécution des dépenses de biens et services est marquée par un taux de réalisation de 40,8% pour les dépenses de personnel et de 45,1% pour les dépenses afférentes aux «autres biens et services». L’augmentation de ces dépenses s’élève à 1,4 Md de DH et 4,5 Md de DH, respectivement.
- Les intérêts de la dette ont, pour leur part, connu un taux de réalisation de 41,6%. Leur augmentation par rapport à la même période de l’année précédente, soit +1,8 Md de DH, recouvre une hausse des intérêts de la dette extérieure pour +1,3 Md de DH et ceux afférents à la dette intérieure pour 529 MDH. Cette évolution est le résultat de la hausse qu’ont connue les taux d’intérêt aussi bien sur le marché domestique qu’international.
- Les charges de la compensation ont enregistré un taux de réalisation de près de 53,6%. Ces charges se sont chiffrées à près de 14,2 Mds de DH recouvrant près de 8,5 Mds de DH pour le gaz butane, 2,2 Mds de DH pour le sucre, 2,5 Mds de DH pour la farine nationale et 920 MDH au titre des subventions accordées aux professionnels du secteur du transport. La charge au titre du gaz butane a affiché une baisse de 1,3 Md de DH par rapport à fin mai 2022. Cette évolution s’explique par l’effet combiné d’une baisse du cours du gaz butane, à soit 600 $/T en moyenne contre 879 $/T au titre de la même période de l’année 2022, et d’une dépréciation du dirham par rapport au dollar, le taux de change étant passé, en moyenne, de 9,7 à 10,2 DH/$ à fin mai 2022.
Ces évolutions des recettes et des dépenses ordinaires se sont traduites par un solde ordinaire négatif de 2,6 Mds de DH, contre un solde négatif de 2,2 Mds de DH un an auparavant.
En ce qui concerne les dépenses d’investissement, les émissions à ce titre ont affiché un taux d’exécution de près de 42%. Elles ont atteint près de 38,2 Mds de DH, enregistrant une progression de 5,4 Mds de DH comparativement aux quatre premiers mois de 2022.
Comptes spéciaux du Trésor
Les comptes spéciaux du Trésor ont dégagé un solde excédentaire de près de 16,2 Mds de DH, contre 21,1 Mds de DH à fin mai 2022.
Les ressources des comptes spéciaux du Trésor tiennent compte d’un montant de 6,7 Mds de DH correspondant au produit de la Contribution sociale de solidarité sur les bénéfices et revenus, affecté au Fonds d’appui à la protection sociale et à la cohésion sociale, contre 6,3 Mds de DH un an auparavant.
Financement
Compte tenu de ces évolutions et d’une réduction des opérations en instance de près de 2 Mds de DH, la situation des charges et ressources du Trésor dégage un besoin de financement de l’ordre de 26,5 Mds de DH.
Ce besoin, augmenté des amortissements au titre de la dette pour un montant de 132,3 Mds de DH, dont 127,9 Mds de DH au titre de la dette intérieure, s’est traduit par un besoin de financement brut de 158,8 Mds de DH. Le niveau des amortissements au titre de la dette intérieure résulte de la concentration des émissions intervenue à la fin de l’année 2022 et au début de 2023, sur les maturités à court terme, en raison de la préférence des investisseurs pour ces maturités dans un contexte d’anticipations haussières des taux d’intérêt.
Les financements mobilisés se sont élevés à 198,8 Mds de DH, dont 162,1 Mds de DH sur le marché intérieur et près de 31,5 Mds de DH au titre des tirages extérieurs y compris 25,8 Mds de DH mobilisés sur le marché financier international.
L’excédent des ressources mobilisées a permis de constituer un matelas pour préparer la couverture, au titre des prochains mois, des tombées importantes de la dette du Trésor issues des émissions à court terme susvisées.
La constitution de ce matelas s’inscrit dans le cadre de la gestion proactive de la dette, dans l’objectif de réduire le risque de refinancement et de permettre au Trésor de faire face à tout nouveau retournement de tendance de marché dans un contexte marqué par un manque de visibilité des investisseurs quant aux décisions de politique monétaire.
L’excédent de trésorerie fait l’objet d’opérations de placement dans le cadre de la gestion active de la trésorerie afin d’optimiser le coût de financement del’Etat.